Dans les coulisses de la cellule de Bercy pour les repentis fiscaux, sur le point de fermer ses portes

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La cellule du STDR n'acceptera plus les demandes de régularisation de fraude fiscale d'ici quelques jours. © Europe 1
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Anne-Laure Jumet, édité par R.Da. , modifié à
Ouvert en 2013, ce dispositif a permis à quelque 51.000 contribuables de régler leur situation vis à vis du fisc en s'acquittant seulement de pénalités allégées. A quelques jours de sa fermeture, le bureau voit affluer les demandes.
REPORTAGE

Les conditions vont bientôt se durcir pour les évadés fiscaux. La cellule de Bercy qui traite les comptes cachés à l'étranger s'apprête à fermer ses portes, après quatre ans d'existence. À partir du 1er janvier prochain, il ne sera plus possible de bénéficier de pénalités allégées. Europe 1 a pu se rendre dans les bureaux de ce service baptisé STDR (Service de traitement des déclarations rectificatives), à quelques jours de la fermeture. Il ne reste donc que très peu de temps aux fraudeurs pour se signaler.

Un pic de régularisations. Dans ces bureaux situés dans le 19e arrondissement de Paris, c’est le calme avant la tempête. Les agents qui recueillent les dossiers de régularisations s’attendent à un pic entre mi-décembre et la fin du mois. Ils reçoivent notamment des appels d’avocats qui se renseignent, signe que l’activité va s’intensifier juste avant la fermeture du service. Des dépôts de la dernière chance pour bénéficier de sanctions moins lourdes.

Ce sont surtout des "fraudeurs passifs", c'est à dire des personnes qui ont hérité de comptes cachés, en Suisse à 90%, qui se sont signalées. Au total 51.000 dossiers ont été déposés pour un montant de 32 milliards d'euros. C'est une opération juteuse pour l'Etat, qui récupère, outre les pénalités, les arriérés de paiement sur l’impôt sur la fortune et sur l’impôt sur le revenu. Le plus gros chèque effectué à ce jour affichait un montant de 50 millions d'euros.

Une opération juteuse. Si on fait les comptes, 8 milliards d'euros ont ainsi été récoltés en quatre ans. "On ne s'attendait pas à un tel succès", confient les personnes en charge de cette cellule. Pour faire face à l’afflux de dossiers, les effectifs ont d’ailleurs été triplés et 10 pôles en région ont été créés. Malgré cela, la moitié des dossiers n'ont pas encore été traités, explique Christiane Ferrigno, responsable du STDR : "C’est vrai qu’on a tout de suite donné une priorité aux dossiers à fort enjeu de manière à engranger un maximum de recettes budgétaires, ce qui est le cas, et on s’est déchargé des plus petits dossiers. On a aujourd’hui les agents, les effectifs et le nombre de dossiers correspondants qui devraient permettre de traiter l’ensemble des dossiers en 2018". La cellule est donc fermée au public, mais les cartons sont loin d’être faits. Les quelque 200 agents qui y travaillent vont continuer à traiter ces dossiers pendant au moins un an.

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Les demandes risquent d'affluer en masse d'ici la fin de l'année. © Anne-Laure Jumet/Europe 1

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Si le service ferme au public le 31 décembre 2018, les dossiers continueront d'être traités en 2018 © Anne-Laure Jumet/Europe 1

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 Le plus gros chèque enregistré par le STDR affichait un montant de 50 millions d'euros © Anne-Laure Jumet/Europe 1

Entendu sur europe1 :
Désormais, il faut sans doute, devant les scandales et la véritable attaque sur le pacte républicain qu’est la fraude fiscale, être beaucoup plus dur

Vers un durcissement des règles. Pour les contribuables, il sera toujours possible de se déclarer au fisc au-delà du 31 décembre. Nénamoins, après cette date, fini les arrangements : les pénalités ne seront plus allégées. "Désormais, il faut sans doute, devant les scandales et la véritable attaque sur le pacte républicain qu’est la fraude fiscale, être beaucoup plus dur", estime le ministre du budget Gérald Darmanin. "Quatre ans et demi ça a été assez long pour que chacun puisse se dire spontanément : 'j’ai fait une bêtise' ", ajoute-t-il.

Une plus grande collaboration entre les Etats. À l’avenir, il sera également plus difficile de passer entre les mailles du filet. Les contrôles vont s’intensifier grâce à l’échange automatique de données bancaires, qui a commencé à s’appliquer en septembre et qui va connaitre une accélération au 1er janvier 2018. Au total, une centaine de pays vont transmettre à la France les données concernant des comptes bancaires ouverts sur leur sol par des Français.

Des millions de nouvelles données vont ainsi permettre au fisc de mieux cibler les fraudeurs. "Ça peut aussi, comme le radar au bord de la route, avoir un effet dissuasif : ceux qui envisageraient de frauder auront peur de se faire prendre",  explique Maïté Gabet, cheffe du service contrôle fiscal. Une première phase à compléter toutefois car aujourd’hui, la plupart des paradis fiscaux listés par l’Union européenne ne font pas partie du dispositif.