Air France : les cinq salariés s'estiment "traités comme des bandits"

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G.S. avec AFP , modifié à
Convoqués par leur entreprise le 28 octobre prochain, les salariés d'Air France poursuivis pour violence s'estiment "traumatisés", dans un entretien à l'AFP.

"Traumatisés" d'avoir été "traités comme des bandits", "l'impression d'être des terrorises"… Les salariés d'Air France poursuivis pour violence sortent du silence jeudi pour la première fois, dans un entretien à l'AFP. Ils s'estiment désignés "coupables avant d'être jugés" par le gouvernement et la compagnie, qui a voulu selon eux "faire un exemple" pour éteindre la révolte.

"Le premier et le dernier" entretien. Dix jours après le comité central d'entreprise d'Air France interrompu par de violents débordements, quatre d'entre eux ont rencontré l'AFP. Seuls deux ont parlé, lors de cet entretien qui sera "le premier et le dernier" accordé aux médias, prévient Mehdi Kemoune de la CGT, présent à leur côté. Visages fermés, traits tirés, aucun ne souhaite s'étendre sur son rôle dans la manifestation du 5 octobre au siège d'Air France, contre les 2.900 suppressions de postes envisagées, qui a dégénéré.

Le nouveau plan "est une catastrophe sociale". Sous la double menace d'une condamnation pénale et d'un licenciement, les salariés incriminés l'affirment : "On n'a rien fait", d'ailleurs la police n'a "pas assez de preuves". Deux dirigeants d'Air France avaient alors été molestés et obligés de s'enfuir, leurs chemises déchirées, en escaladant des grilles. Quatorze plaintes ont été déposées après ces violences: neuf émanant de vigiles et cinq de cadres de l'entreprise.

"Je ne regrette pas d'avoir participé à une manifestation pour sauver mon boulot", lâche simplement David (prénom modifié). "On est venu là pour nos emplois, pas pour casser." Le nouveau plan de restructuration, "c'est une catastrophe sociale", dit Mickaël (prénom modifié). "C'est des divorces, des pertes de maison, de vie... c'est injustifié", soupire-t-il.

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 "L'impression d'être un terroriste". Tous gardent en mémoire la date du "12 octobre", jour de leur interpellation, à l'aube et devant leurs familles. Après une nuit de travail, Mickaël trouve trois policiers devant son domicile, peu après 6h du matin. "Ils ont fouillé chez moi, j'avais l'impression d'être un terroriste." "Le pire, c'est pour les enfants", qui s'interroge selon lui: "Il a disparu papa, qu'est-ce qu'il a fait?" Direction la Police aux frontières (PAF) à Roissy, en charge de l'enquête, pour être interrogés. David se dit personnellement "traumatisé par la garde à vue".

"Nous aussi on s'est fait violenter", alors qu'une simple convocation suffisait selon eux. Depuis sa sortie, mardi soir, il affirme voir un psychiatre. "Je ne dors pas vraiment, je ne mange plus", dit-il dans un souffle. "Je n'ai jamais eu de problème avec la justice, c'est vraiment dur psychologiquement d'être traité comme un bandit", poursuit Mickaël.

"Plus bas que terre". A plusieurs reprises, ils affirment que leur "présomption d'innocence" a été balayée dans le flot de réactions qui ont suivi le 5 octobre. "Des voyous", avait notamment tonné le Premier ministre Manuel Valls. "Nous sommes coupables avant d'être jugés, même par les médias et par Valls", se plaint Mickaël. S'il est innocenté, espère-t-il un "soutien" du gouvernement? "Si un jour on a des excuses, c'est déjà bien. On a été mis plus bas que terre." "Le plus dur à vivre c'est pour la famille, ça passe très mal", ajoute David.

"Double peine". Le chef du gouvernement a assuré jeudi au Sénat qu'il "ne peut pas y avoir d'impunité (...), à l'égard d'actes qui méritent une sanction judiciaire et des sanctions dans l'entreprise". Les cinq salariés, âgés de 35 à 48 ans, seront jugés le 2 décembre devant le tribunal correctionnel de Bobigny pour des "faits de violences en réunion". Ils ont également été mis à pied jeudi à titre conservatoire, sans solde. "Une double peine", pénale et disciplinaire, tranche David.