SNCF : blues des cheminots sur fond d'élections

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avec Fabien Cazeaux , modifié à
Après deux longues grèves en 2010, les syndicats peinent à mobiliser. Une élection test se tient jeudi.

Les grèves, les cheminots ne veulent plus en entendre parler. L’état d’esprit du personnel de la SNCF est au plus bas après deux longues grèves qui n’ont pas abouti à grand-chose en 2010 : 14 jours au printemps pour l’emploi et le fret ferroviaire et deux semaines également à l’automne contre la réforme des retraites.

Le lourd coût de la grève

Conséquence : les syndicats n’arrivent pas à mobiliser aujourd’hui. Une démobilisation qui pourrait avoir des conséquences jeudi lors des élections des représentants du personnel (délégué du personne, membre du comité d'entreprise). Nombreux sont ceux qui font leurs comptes, comme Jessica, agent de gare dans la banlieue parisienne rencontrée par Europe 1. Elle a été de toutes les grèves l’an dernier et ça lui a coûté cher. "Ca fait bien 800 ou 900 euros", estime-t-elle.

"Les fins de mois sont de plus en plus difficiles" :

La jeune femme considère que la grève n’est plus LA solution. Elle va même à penser "que ce n’est pas la seule action qui peut être faite" pour faire passer ses idées.

La fermeté de la SNCF

Car la SNCF l’a montré l’an dernier, elle prend des positions de plus en plus fermes face aux grèves. "Il n’y a plus de négociations quand il y a un conflit", déplore Arnaud Morvan de la CFDT au micro d’Europe 1.

La faute au patron du groupe ferroviaire. Guillaume Pépy n'hésite pas à souligner qu'une journée de grève coûte 20 millions d'euros à l'entreprise. Il le dit lui-même : la nouvelle philosophie à la SNCF, c'est que "la négociation doit rapporter plus que la grève".

L'entreprise publique a aussi renoué avec les bénéfices en 2010 mais elle continue à se réorganiser, à supprimer des emplois - surtout au fret - et à se préparer à la concurrence pour le trafic "voyageurs".

Sud-Rail tente sa chance

Malgré la baisse de moral des troupes et la résistance affichée de la direction de la SNCF, le syndicat le plus radical, SUD-Rail, estime qu’il ne faut "rien lâcher". Toujours en pointe dans les grèves les plus longues, l’organisation veut tenter une percée jeudi, dans les élections professionnelles.

Cette section regroupait à peine une poignée de militants il y a cinq ans, et aujourd'hui, ils sont 70. Bien implantés à la Gare du Nord, ils partent à la conquête de tout le nord de la région parisienne et tentent de s’étendre jusqu’en Picardie, quitte à s'attaquer à plusieurs gros bastions tenus par la CGT ou la CFDT. Lors des dernières élections en 2009, SUD-Rail avait recueilli 17% des voix.

Le cheval de bataille du syndicat : le combat. Emmanuel Grondein, qui sillonne les dépôts de conducteurs les uns après les autres, a affirmé à Europe 1 que les cheminots rejoignent Sud "parce qu’ils ne se sentent pas appuyés par d’autres et parce que quand ils ont envie de se battre on leur dit : il faut retourner au travail".

La CGT restera-t-elle majoritaire ?

Lors du dernier scrutin, en 2009, la CGT avait, malgré une légère baisse, maintenu son assise avec plus de 39% des voix. Depuis le syndicat a vu son secrétaire général Didier Le Reste partir en retraite. Il a été remplacé par Gilbert Garrel, sans inflexion notable. Outre SUD-Rail, l'Unsa avait aussi poursuivi sa progression en 2009 et obtenu 18%.

La CFDT, affaiblie suite à l'hémorragie de ses militants après la réforme des retraites de 2003, avait recueilli un décevant 11,6% malgré son alliance avec le syndicat de conducteurs Fgaac. Enfin, les autres syndicats (FO, CFTC, CFE-CGC), passés sous la barre des 10%, ne sont plus représentatifs à la SNCF au niveau national, en vertu de la loi de 2008.

SUD-Rail et l'Unsa vont-ils poursuivre leur progression ? La CGT son érosion au sein de l'entreprise publique ? Le scrutin de jeudi apportera un début de réponse.