Le numérique au secours des jeunes en difficulté

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Carole Ferry et , modifié à
PLAN B - Dans le cadre du plan pour la mixité sociale, le gouvernement mise sur le numérique pour repêcher les décrocheurs.

Pour lutter contre le sentiment d’apartheid qui prédomine dans certains quartiers défavorisés, le gouvernement a décidé de dégainer une batterie de mesures en faveur de la mixité sociale. Des réformes en grande partie consacrées au logement, mais pas seulement : Matignon veut aussi agir sur l’éducation en favorisant la création "d’écoles du numérique". Un concept encore méconnu mais qui a déjà commencé à voir le jour en France grâce à des initiatives privées. Et visiblement, ça marche.

L’Etat veut développer des formations au numérique. Parce que l’ascenseur social ne passe pas que par le logement, le gouvernement a prévu un volet "Education" qui sort des sentiers battus. Il prévoit en effet de développer des offres de formations courtes au numérique, destinées à un public assez large, "allant du jeune en décrochage scolaire à celui titulaire d'un bac+2", selon une source gouvernementale. Un pari d’autant plus justifié que la France manque de bras dans ce domaine : 10.000 emplois sont à pourvoir chaque année mais le personnel formé au code informatique manque. L’idée est donc de proposer une formation courte, gratuite et professionnalisante pour permettre à ceux qui n’ont pas de diplôme de travailler dans l’informatique.

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Des formations innovantes qui existent déjà. Si le gouvernement mise sur ces formations, c’est parce qu’elles commencent à faire leurs preuves. Confronté à une pénurie de main d’œuvre qualifié, le secteur informatique a déjà mis en place ce genre de formations : l’école 42, créée par le fondateur de Free Xavier Niel, ou encore Simplon.co, lancée en 2013 par trois entrepreneurs et un enseignant.

Europe 1 s’est justement rendu dans les locaux de cette dernière, installée dans une ancienne usine en  plein cœur de Montreuil, en Seine Saint-Denis. Un lieu qui ressemble plus à une start-up qu’à une école : un immense loft avec une kitchenette, un coin café et des canapés. Un des rares indices qui laissent penser que des cours ont bien lieu ici : il y a bien un tableau sur un mur, autour duquel les élèves s'installent sur des chaises hautes pour apprendre la programmation informatique et la création de sites internet.

"J’ai appris comment apprendre". Simplon.co propose des formations de six mois, gratuites, et ciblent en priorité les jeunes issus des quartiers populaires et les filles, sous-représentées dans le monde de l’informatique. Le recrutement de l’école sort, lui aussi, de l’ordinaire : pas  besoin de CV ni de diplôme, les candidats effectuent un test pour vérifier qu’ils disposent des compétences de base indispensables.

Une formule qui a réussi à Zack, 23 ans, qui n'avait aucun diplôme quand il a postulé. Six mois plus tard, sa vie a changé : "Je ne croyais pas que j’allais réussir. En fait, il n’y avait que des codes mais il suffit juste d’apprendre une logique et après ça va vite. J’ai vu que j’ai les capacités d’apprendre : j’ai appris comment apprendre et quand on veut, on peut", témoigne-t-il, avant d’ajouter : "je suis développeur, j’ai un métier et je suis content".

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"Donner l’opportunité de se révéler". La porte de Simplon.co est donc ouverte à tous, mais les candidats doivent être motivés. "On ne dit pas que c’est possible pour tous, on dit que c’est possible indépendamment du niveau de diplôme. Est-ce que tout le monde peut devenir programmeur ? Non. Mais en revanche notre objectif est de donner l’opportunité à des gens qui sentent qu’ils ont envie de travailler là dedans de se révéler", souligne l’un des fondateurs de l’école, Erwan Kezzar. Certains anciens élèves se retrouvent même à donner des formations à HEC, l'une des plus prestigieuses écoles de commerce françaises.

Et ce n’est qu’un début : Simplon vient d'ouvrir une école à Marseille et compte faire de même en avril en Ardèche. Objectif affiché : créer une quinzaine d’école d’ici mi-2015, en France et à l’étranger. Il faut dire que la demande est exponentielle : "aujourd'hui, pour une formation, on a en moyenne 50.000 candidatures pour 900 places", affirmait en octobre 2014 Frédéric Bardeau, l’un des cofondateurs, dans les colonnes de Challenges.