Le boycott des syndicats pénalise-t-il le gouvernement ?

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Alexis Toulon , modifié à
BRAS DE FER – La conférence sociale devait être un moment de dialogue entre partenaires sociaux. Elle est devenue la tribune des mécontents du gouvernement.

La troisième conférence sociale a débuté lundi et les tensions s’exacerbent entre les partenaires sociaux et l’Etat. La CGT et FO ont déjà claqué la porte en annonçant qu’ils ne participeront pas au second jour de conférence mardi. Seule la CFDT et les représentations patronales continuent de prôner le dialogue. L’exécutif peut-il sortir indemne de cet affrontement, dont il a lui-même posé les bases en 2012 ?

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Un grand rendez-vous social annuel qui avait bien commencé. Dès son arrivée à la tête de l’Etat, François Hollande a voulu remettre les partenaires sociaux au cœur des réformes clefs de son quinquennat. Pour ce faire, il a promis que chaque année, une grande conférence sociale réunira syndicats et patronat, dans le but de préparer les réformes à venir. C'est ainsi que la loi de 2013 sur la sécurisation du marché de l'emploi et la loi de 2014 sur la formation professionnelle ont été négociées. Mais les récentes prises de positions du gouvernement, en faveur des organisations patronales, notamment sur la pénibilité du travail, a provoqué la fureur des syndicats qui ont décidé de quitter la table des négociations.

Sauf que deux ans plus tard ? D’âpres négociations avaient été menées par les syndicats pour obtenir un compte pénibilité en contrepartie de la réforme des retraites menée par Jean-Marc Ayrault, votée en janvier 2014. Or, Manuel Valls a décidé le 1er juillet d’un report partiel de la mesure, sous la pression du patronat. La réaction syndicale ne s’est pas fait attendre : le boycott promis par les patrons sera celui des syndicats. "Le problème réside dans les signaux envoyés par le gouvernement, qui semble répondre plus aux sollicitations du Medef qu’à celles des syndicats", analyse Laurent Bouvet, professeur de science politique à l'Université de Versailles Saint-Quentin en Yvelines.

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Un "gouvernement malhabile". Or, "un gouvernement de gauche, même s’il prend un virage libéral, doit toujours envoyer des signaux vers les syndicats, qui représentent le monde du travail", souligne le professeur. En effet, les syndicats sont également les partenaires naturels de la gauche, qui défend les travailleurs. "Le gouvernement est malhabile", résume Laurent Bouvet. En effet, malgré le faible niveau de syndicalisation et "l’image pénible" qu’ils peuvent avoir dans l’opinion publique, ils restent les défenseurs de tous les travailleurs et "un gouvernement qui fait une politique qui va à leur encontre, fait une politique éloignée de son électorat traditionnel", analyse le professeur. Les relations sociales ont "un coût, comme la reconnaissance de la pénibilité, qu’il faut accepter", résume-t-il.

Un faux débat. Toutefois, pour Stéphane Rozès, politologue et président de Cap, les problématiques des Français sont ailleurs. "Les débats au sein du PS ne sont pas les sujets de l’électorat", assure-t-il. En effet, le politologue rappelle le principal sujet de préoccupation est "pour neuf Français sur dix que notre modèle social perdure". Ainsi, plus que la méthode, ce serait sur la capacité à donner confiance aux Français et en prouvant que les mesures prises sont justes et efficaces que le gouvernement est jugé. "L’électorat de gauche ne distribue par les bons et les mauvais points en fonction des cadeaux faits aux patrons, sinon la gauche de la gauche aurait fait de meilleurs scores aux municipales et aux européennes", conclut Stéphane Rozès.

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