Dexia : cette hausse de salaires qui ne passe pas

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Alexis Toulon , modifié à
POLEMIQUE - Recapitalisée par la France et la Belgique, pour éviter la faillite, Dexia est en plein démantèlement. Malgré cela, ses dirigeants se sont octroyé 30% d’augmentation.

Mauvaise gestion, crise, Dexia vit sous perfusion de capitaux français et belges depuis 2008. La banque franco-belge a évité la faillite mais pas le démantèlement, ni la casse sociale. Pourtant, ses dirigeants, chargés de limiter le coût pour la collectivité de l’extinction programmée de la banque, avec l’argent public, se sont accordé une hausse de salaire de 30% au 1er janvier. De Bruxelles à Paris, l’ensemble de la classe politique s’est indignée, et à la demande des deux gouvernements, la banque a décidé jeudi de "réexaminer le dossier".

Trois dirigeants payés plus de 450.000 euros par an. Le JDD a révélé dimanche que le directeur financier, Pierre Vergnes, le responsable des risques, Marc Brugière, et le secrétaire général, Johan Bohets, avaient  vu leur rémunération annuelle passer de 340.000 à 450.000 euros au 1er janvier. Le grand patron, Karel De Boeck, n’auraient pas bénéficié de cette hausse. Toutefois, son salaire atteignait déjà la coquette somme de 600.000 euros. Globalement, la banque a accordé à ses dirigeants une hausse de 30% des salaires. De quoi faire grincer des dents des ministres de l’Economie, qui représentent les intérêts de la France et de la Belgique, dans la banque.

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Des explications peu convaincantes. Dexia a tenté de se justifier en expliquant que son démantèlement en cours demandait des "compétences pointues et des professionnels expérimentés". En outre, elle a précisé que "les différents chiffres avancés déforment sensiblement la réalité car les situations individuelles ne sont pas uniformes, ni dans leurs montants, ni dans leur régime".

Les ministres de l’Economie obligés d’intervenir. Pierre Moscovici et Koen Geens ont donc pris leur téléphone pour calmer les ardeurs rémunératrices de la banque. Le ministre français de l’Economie, a pris la parole mercredi à l’Assemblée pour demander "ensemble qu'une nouvelle réunion des instances de gouvernance du groupe puisse se tenir rapidement pour revenir sur cette décision incompréhensible et pour que s'appliquent les décisions que nous avons prises pour les rémunérations dans le secteur public". Sous le feu des critiques, Dexia a annoncé qu’elle allait "réexaminer le dossier" et "convenir prochainement d'une réunion du comité des nominations et des rémunérations, ainsi que du conseil d'administration".

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Retour sur une descente aux enfers. Dexia est gérée en extinction, c'est-à-dire que la banque est démantelée, jusqu’à ce qu’on activité s’éteigne. La crise commence le 30 septembre 2008. Les gouvernements français, belge et luxembourgeois sont obligés de recapitaliser la banque, qui n’arrive plus à se financer, la veille le titre a perdu un tiers de sa valeur. Coût de l’opération : une recapitalisation de 6,4 milliards d'euros et des emprunts sur les marchés garantis par les États.  

- En 2009, le  groupe annonce une première restructuration, souhaite se reconcentrer sur ses activités primaires (le prêt aux collectivités, institutions publiques et le financement de projet) et éviter de jouer sur les marchés, jugés trop dangereux. A ce moment 1.500 emplois sont supprimés dont 260 en France.

- En 2010, la banque obtient un accord avec la Commission européenne sur un plan de restructuration, contrepartie des aides reçues en 2008. La banque doit réduire son bilan de 35% en quatre ans et se séparer de plusieurs de ses filiales. Dexia supprime 665 postes de plus.

- En 2011, les efforts consentis ne portent pas leurs fruits. Sous pression, la banque doit faire une nouvelle restructuration et commence son démantèlement. La France et la Belgique se partagent les filiales. Les pertes sur l’année s’élèvent à 11,6 milliards d’euros.

- En 2012, Dexia est obligée de demander une nouvelle capitalisation. La France et la Belgique mettent une nouvelle fois la main à la poche et injectent 5,5 milliards d'euros. Le démantèlement continue. Fin décembre, la Commission européenne approuve le dernier plan de sauvetage de Dexia et valide son démantèlement. Il ne reste du groupe que Dexia SA et sa filiale Dexia Crédit Local.

- Actuellement, les principaux actionnaires de la banque sont  les Etats français et belge (5,7% du capital chacun), la Holding Communale (composée de provinces et communes belges qui possèdent 12%) et la Caisse des dépôts et des consignations (qui possède 17,6%). Selon la Cour des comptes, l’affaire Dexia a coûté aux contribuables français 6,6 milliards d’euros.

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