Crédit Lyonnais : l'Etat va solder l'ardoise

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Alexis Toulon , modifié à
DECRYPTAGE - Le gouvernement va emprunter 4,5 milliards d’euros sur les marchés financiers afin d’éponger les dernières dettes du groupe.

Dernier acte financier dans l’histoire du Crédit Lyonnais : l’Etat va rembourser, de manière anticipée, une dette de 4,5 milliards d’euros. Un des articles de la loi de finances rectificative de 2013 qui doit être présentée mercredi en Conseil des ministres avant d’être envoyé au Parlement. Afin de trouver les crédits nécessaires, le gouvernement va emprunter la somme sur les marchés financiers en décembre. Retour sur un scandale politico-financier qui aura coûté au contribuable près de 15 milliards d’euros.

Retour sur la chute d’un géant. Nationalisé au début des années 80, le Crédit Lyonnais a été un géant de la banque dans les années 80. Victime de sa gloutonnerie, la banque a investi massivement dans des entreprises fragiles, fait des placements spéculatifs risqués, et d’un retournement de l’économie au début des années 90, notamment la chute du marché de l’immobilier en 1991, le Crédit Lyonnais est en quasi faillite en 1993. Les vingt années qui suivent ne sont qu’un mélange de scandales politico-financiers et de remboursement pénible de la dette immense du groupe.

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Il faut sauver le soldat lyonnais. Le système financier, en France et à l’étranger (les filiales du Crédit Lyonnais se retrouvent dans de nombreux pays), est en danger. Alors, l’Etat rachète les actifs toxiques de la banque via un Consortium de réalisation (CDR). Afin d’assurer la santé économique de la banque, il crée un Etablissement public de financement et de restructuration (EPFR) qui emprunte 19,8 milliards d’euros. Bonne opération en apparence : l’Etat est un débiteur on ne peut plus sûr. Il se sert de la revente des filiales toxiques pour financer son emprunt, et quand ça ne suffit pas, il se sert des dotations d’Etat (financements directs). Mais la revente des filiales s’apparente à une grande braderie et, outre les critiques, les rentrées sont très insuffisantes compte tenu de la taille de la dette.

D’où sortent ces 4,5 milliards ? En 20 ans, l’Etat a eu le temps de rembourser une bonne partie de sa dette. Il n’en reste "que" 4,5 milliards d’euros. Or, le gouvernement a jusqu’au 31 décembre 2014 pour rembourser cette somme. Aucune surprise là dedans : le problème de l’échéance de la dette est connu depuis 2006. Le Parisien rappelle que la Cour des comptes avait alerté le gouvernement Fillon fin 2010 sur la nécessité d’amortir progressivement la dette de l’EPFR. Mais un trou de 4,5 milliards dans les caisses fait mauvais genre quand on essaye de rééquilibrer ses comptes et de montrer patte blanche dans sa politique budgétaire. 

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Pourquoi maintenant ? L’échéance est dans plus d’un an. Le gouvernement veut profiter des conditions d’emprunt actuelles pour trouver la somme sur les marchés financiers. Le taux auquel la France emprunte actuellement est très intéressant : environ 2,3% pour ses obligations à dix ans. Toutefois, ces taux ont régulièrement augmenté depuis les six derniers mois, mais restent bas. La nouvelle dégradation du pays par Standard & Poor’s n’a pas trop affecté le taux d’emprunt à dix ans. Toutefois, rien ne garantit qu’une nouvelle mauvaise annonce n’affectera pas durablement la confiance des investisseurs et augmentera le coût du crédit.

De plus, l’inflation est au plus bas. Elle ne peut donc qu’augmenter. Or, quand l’inflation augmente, le coût du crédit diminue, car l’euro futur (qui rembourse) a plus de valeur que l’euro qui a été emprunté. Autre avantage, le budget français a déjà été voté et validé : la nouvelle facture n’apparaît pas dans les lignes de comptes envoyées à Bruxelles pour 2014. Reste la partie judiciaire, dont l'affaire Tapie est un symbole. 

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