Budget 2013 : rigueur, quel impact ?

Le projet de loi des Finances 2013 (PLF), fixant le budget, les hausses d'impôts et les réductions de dépenses, doit être dévoilé vendredi en Conseil des ministres.
Le projet de loi des Finances 2013 (PLF), fixant le budget, les hausses d'impôts et les réductions de dépenses, doit être dévoilé vendredi en Conseil des ministres. © MaxPPP
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3' CHRONO - Le Conseil des ministres s'apprête à présenter un tour de vis "historique".

Réaliser 30 milliards d'économie, réduire le déficit public de 4,5 à 3%, inverser la courbe du chômage, le tout avec une croissance qui devrait difficilement atteindre les 0,8%. Telles seront les exigences directrices du budget 2013, présenté vendredi en Conseil des ministres.

Mais sont-elles compatibles entre elles? Rien n'est moins sûr, répondent en chœur les experts. Car rigueur implique baisse de croissance, ce qui implique chômage et aggravation des déficits. Europe1.fr vous décortique cette vicieuse mécanique en trois minutes chrono.

François Hollande invité au JT de 20 heures de TF1.

© REUTERS

• Ce que prévoit le tour de vis. Le budget 2013 devrait acter 10 milliards d'euros de réduction de dépenses publiques, 10 milliards d'impôts supplémentaires pour les ménages, et 10 autres pour les entreprises.  S'y ajouteront 2,5 milliards trouvés au sein de la Sécurité sociale et 5 milliards provenant des mesures prises à l'été 2012, comme la fiscalisation des heures supplémentaires.

"Ce sera l'effort budgétaire le plus important depuis 30 ans", a prévenu François Hollande début septembre. Dans le détail, le président de la République promet que "les prélèvements supplémentaires seront concentrés sur les plus favorisés", que les "mesures fiscales qui pourraient décourager la consommation" vont être évitées, et que les "grandes entreprises seront davantage mises à contribution que les PME". Devraient, tout de même, se glisser des taxes concernant tout le monde, sur le tabac ou les bières par exemple.  

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centre des impots finances publiques MAXPPP 930620

• L'impact de l'impôt sur la croissance. L'augmentation du paquet fiscal est néfaste pour l'activité. Les hausses d'impôts et des taxes diminuent le pouvoir d'achat, donc la consommation et l'activité des entreprises. Cela concerne même les ménages les plus aisés, qui risquent de davantage épargner que consommer.

De plus, "quand on augmente les impôts, il y a un désinvestissement massif des entreprises, même quand on augmente les impôts des ménages, puisque comme les entreprises se disent que les ménages vont consommer moins, elles investissent moins", détaille Patrick Artus, directeur de la recherche et des études chez Natixis.

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• L'impact des réductions de dépenses sur la croissance. Lorsqu'un ministère voit son budget diminuer, la consommation baisse également. Une baisse ou un gel des salaires des fonctionnaires, ou des transferts sociaux, poussent en effet les bénéficiaires à moins dépenser. Deux écoles s'affrontent toutefois sur l'ampleur des conséquences d'une réduction des dépenses.

Certains estiment que lorsque les dépenses publiques baissent d'un point de PIB, l'impact négatif sur la croissance est aussi d'un point de PIB. Mais une autre école, cité par l'Expansion, se base sur des travaux du FMI, et juge que qu'un point de baisse de dépenses publiques entraine deux points de baisse de croissance.

07.05.Elie Cohen

© EUROPE1

• Une crainte partagée par de nombreux économistes. Les experts semblent unanimes pour confirmer qu'un tel tour de vis va plomber la croissance. Et que l'objectif de réduction de 3% du déficit semble intenable. "Pour vous donner une idée, les 37 milliards d'économies vont nous donner une croissance négative d'environ 0,5 ou 0,7% en 2013", assure un expert citée par l'Expansion.com.

"Il va bien falloir que quelqu'un se dise un matin que, lorsque l'ensemble de la zone euro est en train d'aller à la récession, la priorité absolue, ce n'est pas de demander aux pays de réduire autant leur déficit", renchérit Elie Cohen, directeur de recherche au CNRS. "On a sous-estimé l'impact des plans de rigueur sur la croissance", renchérit Mathieu Plane, de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Se conformer aux 3% coûte que coûte traduit un "fétichisme des chiffres", ose l'économiste-philosophe Jacques Delpla.

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• Les conséquences sur l'emploi et les déficits. Si la croissance baisse, l'emploi baisse. Les économistes estiment qu'il faut 1,5% de croissance pour renverser la courbe négative du chômage. Le gouvernement prévoit 0,8%. Et comme on vient de le voir, le tour de vis risque fort de rabaisser ces prévisions.

Par ailleurs, l'objectif de 3% de réduction de déficit, qui justifie ce tour de vis, est menacé par le tour de vis lui-même. Car une baisse de croissance signifie une baisse des recettes. Car si les Français consomment moins, la TVA rentre moins dans les caisses de l’État.  Et si les entreprises sont affaiblies, les salaires stagnent, aux dépens des recettes tirées de l'impôt sur le revenu par exemple.

De plus, l'augmentation du nombre de chômeurs coute chère au budget de l’État. On estime, en effet, qu'un seul chômeur coûte entre 20 à 30.000 euros par an aux finances publiques. Une simple baisse de 0,1 point de croissance coûterait 2 milliards d'euros aux finances du pays, selon l'Insee.

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>>>ÉDITO : le chroniqueur d'Europe1, Axel de Tarlé, revient sur la nécessité de ne pas effrayer les marchés :