Agriculture : les céréaliers mangent leur pain noir

© REUTERS
  • Copié
avec AFP , modifié à
ARGENT - L’Insee a fait le bilan d’une année 2014 difficile pour les agriculteurs, et particulièrement pour les céréaliers, qui ont vu leurs revenus divisés par deux.

L’année 2014 risque de laisser un goût amer au monde de l’agriculture. Car si les récoltes ont plutôt été bonnes, ce fut aussi le cas à l’étranger. Si bien que les récoltes très abondantes ont fait chuter les prix. Et les revenus des agriculteurs avec. 

"Il y a une baisse généralisée des revenus en agriculture, en repli de près de 25% par rapport aux trois dernières années. Même si quelques secteurs tirent leur épingle du jeu, il s'agit bien d'un séisme", a réagi le syndicat agricole FNSEA.

03.06.Ble.cereale.agriculture.930.620

© REUTERS

Une chute vertigineuse pour les céréaliers. Alors qu’ils figurent habituellement parmi les agriculteurs qui gagnent le mieux leur vie, les céréaliers ont subi une perte de revenus d'environ 60% en 2014, selon des prévisions du service statistique du ministère de l'Agriculture (Agreste). Soit un revenu plafonné à 11.500 euros annuels, alors qu’en 2012 ils gagnaient 60.000 euros par an.

Plusieurs raisons à cet effondrement : les récoltes de céréales ont été abondantes, mais de piètre qualité en France. Et avec des moissons record de blé et de maïs dans le monde, les cours se sont installés durablement sous les 200 euros/tonne sur Euronext.

Mais aussi pour les arboriculteurs. Ce secteur est aussi dans le rouge, avec des revenus en baisse de 56%, à 13.400 euros. En cause, une production de pêches et d'abricots "plus abondante" en 2014 et des prix en baisse, la concurrence espagnole tirant les cours vers le bas.

>> LIRE AUSSI - Les prix des fruits et légumes ont (vraiment) chuté

03.06.foinvache2.Maxppp.930620

L’élevage commence à aller mieux ou presque. Les éleveurs ont en revanche connu un meilleur sort. Face à la crise de ce secteur depuis des années, le gouvernement français a en effet choisi de privilégier les éleveurs dans la nouvelle PAC 2014-2020, aux dépens des céréaliers qui ont vu leurs aides reculer d'environ 10%. Résultat, les éleveurs ovin et caprin voient leur situation s'améliorer avec une rémunération attendue en hausse de 23% à 20.000 euros.

Les éleveurs bovins viande restent, eux, dans une situation très difficile avec des revenus attendus en baisse de 21% à 14.500 euros. Les éleveurs porcins subissent de plein fouet l'embargo et la concurrence de l'Allemagne ou de l'Espagne, et leurs revenus devraient reculer de 18% à 22.100 euros.

>> LIRE AUSSI - Les éleveurs redoutent le traité de libre-échange

Le secteur viticole va bien, lui. Les viticulteurs ont le vent en poupe avec des revenus qui progressent en moyenne de 27% à 46.200 euros. La récolte est "en forte hausse" mais les prix "resteraient bien orientés sur la campagne", selon Agreste.

11.06_vache-pis-lait-MAXPPP-930x620.jpg

Les producteurs de lait aussi, mais… Eux aussi ont profité de la hausse des prix du lait, avec un résultat par actif non salarié en hausse de près de 30%, à 30.100 euros. Mais cette situation devrait toutefois se retourner dans les mois à venir. Les cours du lait reculent depuis le début de l'année. L'embargo russe sur les produits alimentaires depuis août a enfoncé le clou et la fin des quotas laitiers en avril prochain en Europe ne devrait pas améliorer les choses.

>> LIRE AUSSI - Sanctionnée, la Russie attaque l’agriculture occidentale

Stephane-Le-Foll-1280x640

© REUTERS

Le gouvernement veut stabiliser l’économie agricole. Ces variations brutales des prix, et donc des revenus des agriculteurs, fragilisent le secteur. L’Etat a bien tenté de soutenir l’agriculture, comme l’a rappelé le ministre de l'Agriculture, mardi sur RTL : "dans certains secteurs, on a mis en place des allègements de charges, des reports de remboursement, mais dans beaucoup d'endroits on a des exploitations agricoles qui risquent de basculer dans la grande difficulté et de ne plus être en mesure d'assurer leur pérennité".

Et Stéphane Le Foll d’ajouter qu’il "faut trouver des solutions et faire en sorte de trouver des exportations pour dégager les excédents et, sur les prix, trouver des mécanismes pour éviter les chutes brutales des cours, notamment sur le lait". Sauf que c’est précisément le rôle que joue la PAC, et la France aura du mal à mettre en place un outil plus efficace.

>> Retrouvez la chronique d'Axel de Tarlé, consacré au même sujet :