Son père, Jean-Loup Dabadie, Gisèle Halimi : les icônes de la vie de Nicolas Bedos

Nicolas Bedos se confie au micro de Michel Denisot dans "Icônes" (photo d'archives).
Nicolas Bedos se confie au micro de Michel Denisot dans "Icônes" (photo d'archives). © Europe 1
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Margaux Lannuzel , modifié à
Premier invité du nouveau rendez-vous de la matinale du samedi sur Europe 1, Nicolas Bedos évoque au micro de Michel Denisot les icônes qui ont marqué sa vie, notamment son père et le parolier Jean-Loup Dabadie, mais aussi sa marraine, Gisèle Halimi, et l'acteur Jean Dujardin.
INTERVIEW

Il a repris le flambeau de Michel Hazanavicius pour réaliser le troisième volet de la saga OSS 117, Alerte rouge en Afrique noire, qui sortira en février 2021. Mais ce n'est pas ce film très attendu que Nicolas Bedos a évoqué au micro d'Europe 1, samedi. Premier invité du nouveau rendez-vous de la matinale, Icônes, le fils de Guy Bedos a accepté de faire un pas de côté pour se prêter au jeu de l’égrainage des grandes figures de sa vie, passée et présente... avec humour et émotion. 

Guy Bedos et la liberté d'expression

"Je suis extrêmement troublé que mon père ait disparu l'année qui, en tous cas à ma connaissance, est la pire année pour la liberté d'expression qui soit", souffle d'abord Nicolas Bedos, quelques mois après le décès de son premier modèle à l'âge de 85 ans. Ému, le réalisateur se dit aussi "presque soulagé" que Guy Bedos ait pris "beaucoup de champ avec l'actualité" à la fin de sa vie. "S'il avait été totalement lucide, ça lui aurait paru encore plus étranger", estime-t-il, évoquant les multiples polémiques fleurissant sur les différents réseaux sociaux à propos de tel ou tel artiste, chanteur ou comédien. "J'ai l'impression d'avoir 175 ans tellement je suis consterné par ce que j'observe", assène-t-il. "Je rêve d'un moment où on va tous, tout le monde, se serrer les coudes et dire : 'ça suffit'."

Jean-Loup Dabadie, "un homme extrêmement rigoureux"

Deuxième grande figure de la vie de Nicolas Bedos décédée en 2020 : son parrain, le parolier Jean-Loup Dabadie. "Si Jean-Loup n'avait pas existé, je pense que je ne serais pas la personne que je suis", commente-t-il sobrement au micro de Michel Denisot. "C'est un homme qui m'a transmis un doute, une très, très grande anxiété. Il n'était jamais content. (...) D'ailleurs, cette arrogance qu'on me prête parfois dissimule souvent la trouille." Mais son parrain n'était, selon lui, pas seulement anxieux : "Il avait aussi un masque. Cette espèce de ton un peu badin, un peu mondain, un peu spirituel et parisien, cachait un homme extrêmement rigoureux, extrêmement sérieux. Ce sont des choses qui m'ont ému chez lui. Il pouvait passer plusieurs mois sur l'adaptation d'une pièce américaine. Il avait toujours l'impression que ses scénarios n'allaient pas se monter."

Gisèle Halimi, "un courage inouï"

"C'est presque une blague... Je viens aussi de perdre ma marraine, Gisèle Halimi", poursuit Nicolas Bedos avec une note d'humour. Décédée en juillet, l'avocate et figure féministe "se réjouissait de la sortie de son livre d'entretiens (Une farouche liberté, aux éditions Grasset) quelques semaines avant de partir", assure son filleul. "Et voilà qu'il y a beaucoup de gens qui découvrent cette petite fille qui se bat dès l'enfance contre l'injustice qu'il y avait dans le traitement de ses parents entre son frère et elle, et qui traverse des kilomètres au fin fond de la Tunisie pour accéder au savoir, à la culture, à la littérature, à l'école.... Moi, j'ai été élevé par des gens absolument éblouissants qui ont fait preuve d'un courage, d'une abnégation que je n'ai jamais eu à prouver, que je n'ai jamais eu à avoir", sourit-il. 

"Elle s'est fait insulter, elle s'est fait torturer, elle s'est fait gifler, elle s'est pris des mollards dans la gueule. Elle a défendu des causes qui n'étaient pas à la mode...", poursuit Nicolas Bedos. "Votre émission s'appelle Icônes et moi j'aimerais faire comprendre au public qu'avant d'être des gens qui sont devenus quasiment légendaires, il faut un courage inouï. Et je pense aussi bien à Claude Monet qu'à Stravinsky, en passant par Miles Davis jusqu'à Gisèle Halimi dans des genres très différents. (...) À la base de ça, il y a du courage et il y a de l'acrimonie. Il y a du refus, il y a des années de solitude."

Doria Tillier, "une forme d'iconographie amoureuse"

Autre femme importante dans la vie de Nicolas Bedos : l'actrice Doria Tillier, avec qui il a été en couple et tourné plusieurs films. "J'ai eu la chance de fabriquer une forme d'iconographie amoureuse avec elle, ce qui nous a fait vivre d'ailleurs des sentiments très, très inédits et très troublant puisque on a fini par se regarder par le biais, parfois, de notre fiction commune", analyse-t-il. "Le cinéma, le travail des dialogues nous a presque augmentés dans le regard que l'on avait l'un sur l'autre. Après, c'est peut être presque une sorte de boulet embarrassant parce qu'on se traîne comme ça... Cette forme d'auto mystification, d'auto mythologie qu'il faut après dépasser, puis revenir au réel, à la réalité."

Jean Dujardin, "j'étais devenu un peu groupie"

Entre les deux acteurs, la rencontre a été "totalement spontanée, intime, immédiate, amicale", s'enthousiasme Nicolas Bedos. "C'est inexplicable. À un moment donné, il y a un type au bar et puis, on a envie de passer du temps jusqu'à l'aube avec lui. Ça n'a plus rien à avoir avec le métier, ça n'a plus rien à voir avec tout ça. Jean, c'est quelqu'un avec qui je continuerai à échanger sur les choses de la vie, de la paternité, de l'amour, si demain on se retrouvait à être privé du métier qu'on veut faire." 

Après leur rencontre, Jean Dujardin a rapidement connu le succès international avec le film The Artist. "Il m'a embarqué dans ses valises pour aller à Los Angeles, aux Oscars. J'étais devenu un peu groupie", se souvient son ami. "Je le regardais comme comme j'ai parfois regardé certaines femmes fatales débarquant dans ma vie. J'étais un peu un peu amoureux de lui parce que je lui trouvais, non seulement cette extraordinaire séduction qui était la sienne, mais aussi ce succès caricatural et très, très exotique. (...) Il m'a beaucoup charmé par sa façon très enfantine et assez modeste de le vivre. J'ai rarement vu quelqu'un vivre des choses aussi troublantes avec autant d'élégance."