Le journaliste David Castello-Lopes, dans l'émission Historiquement vôtre sur Europe 1, revient tous les jours sur les origines d'un objet ou d'un concept. Ce mercredi, il s'intéresse au prompteur, cet objet utilisé à la télévision par les journalistes et les hommes politiques. De ses débuts en simple bout de papier, à son évolution dans les années 80, pour devenir aujourd'hui une machine qui s'adapte à la vitesse de votre voix, il nous raconte tout.
"La télévision et l’image animée en général, c’est le média le plus mensonger. Je m’explique un peu. Le truc avec la télé et le cinéma c’est que ça inspire confiance… Plus que le son tout seul ou l’écrit. On se dit 'C’est la réalité, puisque je la vois et je l’entends'. Mais précisément parce que ça inspire confiance, et bien c’est plus facile pour la télévision de mentir et de transmettre des réalités complètement fausses qui ont l’air implacables.
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Dans ce studio par exemple, où cette chronique est en train d’être filmée. Si pendant ma chronique, on montre votre visage rieur Stéphane, on va se dire : 'Quel succès cette chronique ! Même le grand Stéphane Bern semble l’apprécier'. Si en revanche on montre le visage d’Olivier Poels, son air de Gargantua privé de dessert, alors là on va se dire : 'Qu’est-ce qu’elle est naze cette chronique. Rendez nous Zitrone, ça c’était du journalisme'. Et de la même façon, si vous filmez de face un monsieur qui lit un prompteur sans jamais filmer aussi ledit prompteur, vous avez l’impression que Stéphane connaît tous les textes de Secret d’histoire sur le bout des doigts.
La magie du prompteur
Bon pour lui il se trouve que c’est vrai parce que sa mémoire est prodigieuse mais pour les simple mortels de l’audiovisuels, c’est faux. PPDA il avait vraiment l’air de sortir les infos sur les attentats à Beyrouth de sa mémoire. Alors que non. Emmanuel Macron quand il nous dit qu’on va être confinés jusqu’en 2024, il a l’air de le sortir de ses tripes. Mais en fait non. Et ce mensonge, c’est le prompteur qui le rend possible.
Vous avez tous fait de la télé ici donc vous savez comment ça marche un prompteur. Mais pour ceux qui ne savent pas, le truc brillant du prompteur, c’est que le texte que vous devez lire, il défile devant l’objectif de la caméra. Et que donc quand vous le regardez ce texte, pour le lire, et bien vous regardez aussi l’objectif qui se trouve derrière. Mais comment alors ? Et bien grâce à une vitre inclinée placée devant l’objectif. Le texte défilant, il se reflète dans la vitre donc vous le voyez. Mais par ailleurs cette vitre elle est transparente et donc on peut filmer à travers.
Utilisé par Eisenhower en 1952
Alors ça vient on s’en doute des débuts de la télévision. Parce que qu’est-ce qui s’est passé ? Dans les débuts de la télévision, il y a plein d’acteurs qui venaient du théâtre qui sont passés devant la caméra pour présenter des trucs et même jouer dans des petites fictions en direct. Et brusquement, les acteurs ils ont du commencer à apprendre une beaucoup plus grande quantité de texte. Parce que c’était pas une pièce qu’on jouait pendant trois mois. C’était trois pièces par semaine. Et visiblement, il y a en a qui luttaient vraiment.
Et donc ils ont commencé à demander le truc qui est un peu l’ancêtre du prompteur. C’est à dire un gars à côté de la caméra qui tient des cartons avec le texte écrit dessus. Et puis ils se sont dit peut-être qu’on pourrait automatiser tout ça pour que ce soit plus régulier. Et ça a été fait en 1948.
Le premier prompteur c’était un texte écrit sur du papier d’emballage de boucher, qui se déroulait dans un fond de valise avec des courroies reliées à un moteur. Le premier président qui l’a utilisé c’est Eisenhower en 1952. Avec un rouleau qui faisait des dizaines de mètres de long.
Une invention "pour faire vraiment genre"
Mais le problème à ce moment là c’est que le texte était encore placés au dessus de la caméra ou sur les côtés, donc le regard de celui qui parlait était un peu déporté. Mais en 1959, il y a un producteur de télé qui a trouvé le coup du miroir et qui a donc permis aux journalistes et aux hommes politique de faire vraiment genre.
Avec une invention en plus pour les hommes politiques. Qui est le double prompteur pour leur discours. Un à gauche, l’autre à droite. Comme ça ils peuvent passer de l’un à l’autre. Pour faire genre ils s’adressent à tout le monde à la fois.
Alors jusqu’aux années 80, c’était encore un rouleau de papier qui défilait. Ensuite bien sûr c’est devenu des écran, ce qui permet de changer le texte jusqu’au dernier moment. Alors normalement il faut toujours un employé derrière le prompteur qui le fait défiler à mesure que la personne le prononce. Mais la dernière innovation en date, c’est un prompteur qui comprend ce que vous dites. Et qui ajuste automatiquement la vitesse de défilement au débit de votre voix. Pour que le mensonge soit encore plus complet."