Pourquoi les motocrottes parisiennes ont-elles disparu ?

La désormais célèbre motocrotte dans les rues de Paris
La désormais célèbre motocrotte dans les rues de Paris © Twitter/20 Minutes
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David Castello-Lopes
Dans l'émission "Historiquement vôtre" sur Europe 1, le journaliste David Castello-Lopes est revenu sur l'origine et la disparition des motocrottes à Paris. Pour trouver des réponses à ses questions, il a rencontré Yves Contassot, principal acteur de la fin de ce service de propreté.

Le journaliste David Castello-Lopes, dans l'émission Historiquement vôtre sur Europe 1, revient tous les jours sur les origines d'un objet ou d'un concept. Ce mardi, il s'intéresse à la motocrotte. Ou comment est-on parvenu à associer un objet cool, la moto, symbole de liberté, et une action moins cool, à savoir ramasser les excréments de nos animaux de compagnie.

"L'initiative revient à Jacques Chirac, en 1982, lorsqu'il était encore maire de Paris. Les motocrottes, à leur lancement, étaient alors vertes et blanches et munies d'une sorte d'aspirateur à caca. Elles roulaient sur les trottoirs de la capitale pour aspirer les excréments, principalement de chiens. Et elles avaient aussi un surnom, en hommage au maire d'alors : les chiraclettes ! À l'époque, on les voyait partout et, encore enfant, je me disais que c'était l'un des objets les plus bizarres de l'histoire de l'humanité.

Jusqu'à 15 millions d'euros par an

Aujourd'hui, les Parisiens ne voient plus de motocrottes déambuler. Il n'y en a plus. Je me suis donc rendu à l'Hôtel de Ville pour enquêter sur cette disparition et j'ai été reçu par Yves Contassot, principalement connu pour avoir été la tête de liste des Verts aux élections municipales de la capitale en 2001. L'homme se présente aussi comme celui qui a décidé qu'il ne devait plus y avoir de motocrottes sur les trottoirs parisiens.

L'une des raisons principales qu'il avance pour justifier la suppression des motocrottes : le coût. Cela pouvait coûter jusqu'à 15 millions d'euros par an, soit douze euros par kilo de caca aspiré. Suffisant pour qu'Yves Contassot, entre-temps nommé adjoint au maire de Paris chargé de l'environnement et de la propreté à l'issue des élections remportées par le Parti socialiste, se batte pour leur suppression.

Le deuxième argument, avance l'homme politique, est le fonctionnement limité de ces appareils car il fallait vraiment que le conducteur mette le tube en plein au-dessus de la crotte, s’il le mettait juste à côté, ça l’étalait et donc évidemment ça faisait l’effet inverse à celui recherché.

Schizophrénie chez les conducteurs

Enfin, dernière raison du déclin des motocrottes : le manque de conducteurs. "Quand on voit un motard harnaché avec son casque et son cuir, c’est très viril", analyse Yves Contassot, "et puis dans l’imaginaire, s’occuper des crottes, c’est d’une certaine manière le rôle qui était attribué historiquement plutôt aux femmes avec leurs bébés. Donc il y avait une espèce de schizophrénie chez les conducteurs qui disaient 'je dois être un Rambo sur ma moto et puis en même temps on me demande de faire un truc qui est petit peu avilissant'".

Au début des années 2000, environ 120 motocrottes continuent à parcourir les trottoirs de la capitale. Elles sont entreposées dans deux hangars, dont l'un est situé dans le XIVème arrondissement. C'est précisément ce hangar qui, le 11 avril 2002 à minuit, a brûlé. Résultat : 64 des 120 motocrottes sont réduites en cendre. C'est le coup de grâce. En 2004, la dernière motocrotte ramasse le dernier caca de l'histoire à Paris.

Et par quoi a-t-on remplacé ces fameux véhicules pour garder les trottoirs propres ? Une amende de 150 euros pour ceux qui ne ramasseraient pas les déjections de leur animal. Le résultat est là mais il est, avouons-le, beaucoup moins fascinant."