Proust, Roth, Faulkner : les auteurs favoris de Bruno Le Maire

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Antoine Terrel , modifié à
Dimanche, dans "La Voix est livre", le ministre de l'Economie Bruno Le Maire est revenu sur son amour pour la littérature et a dévoilé quelques-uns de ses auteurs favoris, parmi lesquels Marcel Proust, "une révélation" quand il était adolescent. "Fan absolu" de Faulkner, il confie aussi son admiration pour la liberté de littérature américaine. 
INTERVIEW

Personnalité politique de premier plan depuis le milieu des années 2000, Bruno Le Maire est aussi un habitué des rayons des librairies. Depuis 2004, l'actuel ministre de l'Économie est l'auteur de plusieurs romans et essais, dont certains, notamment Musique absolue, ont été bien accueillis par la critique. Et le 14 janvier, il a publié L'Ange et la Bête, dans lequel il raconte la gestion de l'épidémie de coronavirus. Grand lecteur de Proust, il a reçu Europe 1 dans l'émission La voix est livre, et dévoile notamment son amour pour la littérature américaine.

"Chronologiquement, je suis d'abord écrivain", confie l'ancien LR, qui assure avoir écrit ses premières nouvelles à 18-19 ans, avant d'être publié pour la première fois en 2004 avec Le Ministre, dans lequel il raconte son passage au ministère des Affaires étrangères en tant que conseiller de Dominique de Villepin. 

Pour Bruno Le Maire, "la littérature, c'est d'abord un plaisir". "J'ai un plaisir immense à découvrir un texte, exactement comme on découvre un paysage", dit-il encore. Et en politique, poursuit le ministre, la littérature peut servir à "fixer les choses". C'est ce que Bruno Le Maire tente de faire avec son nouveau livre. "Si j'ai voulu écrire ce livre au milieu de la crise, c'est justement parce que je voulais approcher au plus près de la vérité. C'est trop facile d'écrire ses mémoires cinq ans plus tard, lorsque la poussière est retombée. Et en général, soyons honnêtes, on recompose les choses à son avantage", explique le patron de Bercy. 

"Proust a été une révélation pour moi"

Dans son salon, Bruno Le Maire a installé deux grandes bibliothèques remplies à ras bord, avec une partie contenant une vingtaine de pléiades. Lorsqu'on demande au ministre de nommer ses auteurs favoris, ce dernier cite tout de suite Marcel Proust, et notamment "A la recherche du temps perdu". "Cette obsession du temps perdu qu'on retrouve dans la littérature, ça a beaucoup de sens pour moi", développe Bruno Le Maire. Mais son rapport à Proust est encore "plus personnel". "Il a été une révélation pour moi", confie-t-il. "Vers 16-17 ans, je me suis mis à lire A la recherche du temps perdu sur la recommandation d'un de mes professeurs de littérature, et j'ai eu le sentiment, comme rarement en ouvrant un livre, de rentrer dans un monde qui m'a profondément touché." 

De Proust, Bruno Le Maire loue également sa capacité à transmettre des émotions par les mots, et peut réciter par cœur l'incipit Du côté de chez Swann. "Le début de Du côté de chez Swann, quand le narrateur s'endort, que les rêves reviennent et qu'il est réveillé par son propre sommeil, c'est quelque chose d'extraordinaire (...) C'est un univers qui m'a profondément et immédiatement touché." Proust, conclut-il, "c'est d'abord une émotion, avant d'être une réflexion". 

"L'immense liberté" de la littérature américaine

Dans sa bibliothèque, Bruno Le Maire n'a rangé que peu d'essais, et donc quasiment exclusivement des romans. Parmi eux, de nombreuses œuvres d'auteurs américains, comme le poète Walt Whitman. "Whitman décrit à merveille les forêts, les feuilles d'automne, les odeurs, la mousse, les lacs. Tout cela me touche profondément."

Plus largement, "ce qui me plaît au-delà de tout chez les auteurs américains, c'est ce sentiment de liberté sans aucune limite", explique Bruno Le Maire. Alors que la littérature européenne "est une littérature du détail et de l'attention", la littérature américaine, "c'est l'immense liberté, la liberté morale". Et de citer notamment Philip Roth, par exemple, et son livre Portnoy et son complexe, dans lequel il est d'"une liberté sexuelle et morale tout à fait invraisemblable".

Chez les Américains, le ministre de l'Économie loue également leur "liberté de l'espace" ainsi que "la liberté de construction, de style", comme chez Faulkner, dont il se dit "un fan absolu". "Tout d'un coup, il vous fait voir un monde radicalement différent, vu à travers le regard d'une personne qui a un retard mental, ou à travers le regard d'une jeune fille noire qui est opprimée. C'est pour moi ce qu'est fondamentalement la littérature : l'ouverture à des mondes que vous n'auriez pas découvert autrement."