Grand Prix BD d'Angoulême : 30 hommes sélectionnés, aucune femme

© PIERRE DUFFOUR / AFP
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Anaïs Huet , modifié à
Le Festival de BD d'Angoulême a publié, mardi, la liste exclusivement masculine des trente sélectionnés pour son Grand Prix. La colère monte parmi les auteurs.

La parité, un concept encore lointain pour le Festival international de bande dessinée d'Angoulême. C'est en tout cas ce que l'on peut supposer en consultant la liste des trente noms en lice pour le Grand Prix 2016, qui récompense un auteur pour l'ensemble de sa carrière. Pas une seule femme n'y figure. 

"Une discrimination évidente". Une injustice manifeste, puisque le secteur de la BD s'est largement féminisé au cours des dernières années. Mieux, des auteurs de BD femmes ont fortement contribué au regain de popularité du genre, de Marjane Satrapi à Marion Montaigne, en passant par Leslie Plée ou Pénélope Bagieu. La publication de cette liste, mardi, a fait bondir nombre d'auteurs. Le Collectif des créatrices de bande dessinée contre le sexisme -auquel plus de 150 femmes auteurs de BD ont adhéré - s'est insurgé contre "cette discrimination évidente, cette négation totale de notre représentativité dans un médium qui compte de plus en plus de femmes". "On en revient à la notion de plafond de verre, toujours aussi désastreux : on nous tolère mais pas en haut de l’affiche", s'indigne le collectif.

Un appel au boycott. Décidé à ne plus laisser passer de tels manquements à la parité, le Collectif des créatrices de bande dessinée contre le sexisme en appelle au boycott du Grand Prix 2016. Elles se mobilisent et leur colère risque de faire du bruit. Les auteurs et les passionnés de BD sont vent debout, notamment sur Twitter grâce au hashtag #WomenDoBD.

 

Riad Sattouf se retire par solidarité. Solidaire de ses consœurs, Riad Sattouf, auteur à succès qui figure lui-même dans la liste des nommés pour le Grand Prix 2016, a annoncé sur sa page Facebook qu'il se retirait de cette sélection. L'auteur de L'Arabe du futur a par ailleurs indiqué qu'il espérait être réintégré à cette liste "le jour où elle sera plus paritaire".

Une seule femme récompensée. En 43 ans de Festival, seule Florence Cestac a reçu le Grand Prix en 2000. Claire Brétecher, pilier du neuvième art, avait obtenu un prix spécial pour le dixième anniversaire du festival, en 1983. 

Le Festival se défend d'être sexiste. Joint par Le Monde mardi, le délégué général du Festival d'Angoulême, Franck Bondoux, s’est défendu de tout sexisme : "Le concept du Grand Prix est de consacrer un auteur pour l’ensemble de son œuvre. Quand on regarde le palmarès, on constate que les artistes qui le composent témoignent d’une certaine maturité et d’un certain âge. Il y a malheureusement peu de femmes dans l’histoire de la bande dessinée. C’est une réalité. Si vous allez au Louvre, vous trouverez également assez peu d’artistes féminines."

Dans Le Monde, Joanna Schiffer, du Collectif des créatrices de bandes dessinées contre le sexisme, s'est levée contre cet argument : "Les femmes sont présentes depuis fort longtemps dans la bande dessinée. Le problème est qu’elles n’arrivent jamais au finish, on ne mise pas sur elles. La bande dessinée n’échappe pas à l’entre-soi qui règne dans les milieux artistiques et culturels, où les hommes s’élisent entre eux".