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Aurélie Dupuy , modifié à
En 2006, Agnès Varda était l'invitée d'Isabelle Morizet sur Europe 1. Elle évoquait la mort au travers de son film "Cléo de 5 ou 7", dans lequel l'héroïne est peut-être condamnée.
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Figure de la Nouvelle Vague du cinéma, Agnès Varda est morte dans la nuit de jeudi à vendredi à l'âge de 90 ans. En 2006, la cinéaste était l'invitée d'Il n'y a pas qu'une vie dans la vie, à l'époque où trois de ses films étaient projetés à nouveau au cinéma Saint-André-des-Arts, dont le devenu culte Cléo de 5 à 7, sorti en 1962. Au micro d'Isabelle Morizet, la réalisatrice revenait notamment sur la création de ce long-métrage et sur le thème de la mort, qui plane au dessus du personnage de Cléo, peut-être atteinte d'un cancer.

"Un sujet délicat" 

Le temps qui passe et la mort sont des sujets qu'Agnès Varda avait saisis il y a plus de cinquante ans. "Je sais ce que je voulais faire et je l’ai fait en 61", année où elle tourne Cléo de 5 à 7 avec l'actrice Corinne Marchand dans le rôle titre. "C’est un film sur le temps. C’est l’histoire d’une chanteuse, une très très belle femme qui attend les résultats d’un examen médical", retraçait la cinéaste pour Europe 1 en 2006. "5 à 7 c’était une boutade, parce que ça fait un peu coquin, rendez-vous galant, mais en fait c’est de 5h à 6h30 et non seulement on ne la quitte pas, mais le temps est réel et la géographie est réelle." Loin d'une histoire d'amour, "Cléo a peur d’avoir un cancer, elle attend les résultats. La peur du cancer existe toujours mais elle était très violente dans les années 60."

Le spectateur suit alors une héroïne tourmentée. "La peur l’aiguillonne et dans cette heure et demie, elle va d’abord être coquette. Elle va voir ses musiciens, elle va voir son amant et tout d’un coup, elle est choquée, elle se réveille, elle devient presque elle-même. Elle sort dans la rue et elle se met à regarder les gens. Elle va dans un café, elle va dans un jardin et elle rencontre un soldat. Ce soldat apaise sa peur. Ce n’est pas une histoire d’amour, lui reprend le train pour repartir à la guerre d’Algérie. Donc, ce sont deux condamnés, pas forcément à mort mais deux qui sont en péril de mort. Mais ils ont un moment d’entente et de grâce", racontait la cinéaste. "C’est un sujet délicat, difficile et j’ai été épatée qu’on me laisse le faire à l’époque. Dans la folie de la Nouvelle Vague, ils ne regardaient pas trop au détail", commente-t-elle.

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Capture d'écran "Cléo de 5 à 7".

Avec recul, elle voyait bien quelques "scènes pas très bien jouées, des coquetteries, des petites bêtises de langage…" Qu'importe. L'essentiel était pour elle, ailleurs. "Ce n’est pas important, je ne refais pas l’histoire. J’avais la chance que Corinne Marchand, qui est une superbe femme, joue Cléo, parce que c’est le thème de la beauté de la femme. Elle va être attaquée parce qu’elle va peut-être mourir. Les très belles femmes, on n’a pas envie qu’elles meurent. C’est le thème de la beauté et de la mort", concluait la réalisatrice, qui va beaucoup manquer au cinéma.