Naomi Osaka a refusé de participer aux conférences de presse de Roland-Garros pour se préserver mentalement. 7:01
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Antoine Terrel
Alors que la championne de tennis Naomi Osaka a remis au cœur des débats la question de la santé mentale des sportifs, la psychologue du sport Elise Anckaert rappelle sur Europe 1 que ces derniers ont souvent grandi dans une grande exigence de performance, qui rend encore plus taboues les potentielles faiblesses et n'aide pas les sportifs à s'arrêter quand il le faudrait. 
INTERVIEW

Sa prise de parole a mis en lumière un sujet de plus en plus évoqué dans le monde du sport, mais qui reste encore souvent tabou. À Roland-Garros, la championne japonaise Naomi Osaka a refusé de participer aux conférences de presse du tournoi afin de préserver sa santé mentale, et expliqué avoir connu des périodes de dépression après sa victoire à l'US Open en 2018. Et à son image, de plus en plus de sportifs ont récemment assumé publiquement avoir connu des troubles de la santé mentale. Invitée dimanche d'Europe 1, Elise Anckaert, psychologue clinicienne et psychologue du sport à l'Insep, rappelle que les sportifs peuvent avoir d'autant plus de mal à avouer leurs faiblesses qu'ils se sont souvent construits dans une obsession de la performance.

Pour cette spécialiste, il n'est pas surprenant que les sportifs puissent, comme tous, voir leur santé mentale fragilisée. "La quête de perfection des sportifs est quand même un chemin périlleux", explique-t-elle. "Ils commencent en général assez tôt, et se construisent avec un rapport à la performance très particulier… Ils jouent une estime d'eux-mêmes dans leur rapport à la performance, ils sont exposés. Cela peut fragiliser et mettre à l'épreuve leur état de santé."

Les sportifs "ne savent pas toujours dire stop"

"Le sportif est parfois un peu 'objectalisé'", ajoute Élise Anckaert. "On le voit dans son rapport à la performance… C'est comme s'il n'avait pas le droit d'être en mauvaise santé parce qu'il est fatigué, qu'il a plus d'énergie mentale." Or, insiste la psychologue, "les sportifs sont dans une exigence énorme vis-à-vis d'eux-mêmes, et ce sont des facteurs qui peuvent provoquer un moment où c'est le moment de s'arrêter". 

Problème : ces sportifs de haut niveau "ne savent pas toujours dire stop". Aussi, Elise Anckaert insiste sur l'importance d'être bien assisté par ses proches. "L'entourage est aussi responsable du fait de les protéger d'eux-mêmes quand ils ne peuvent pas le faire", estime l'invitée d'Europe 1. 

Citant les nombreuses personnes entourant un sportif, parents, entraîneurs, élus, fédérations, Élise Anckaert martèle que le sportif "doit être en sécurité psychologique ainsi que son environnement". Et de conclure : "Je trouve que c'est très important de resituer la responsabilité de chacun."