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avec AFP , modifié à
Au premier jour de son procès devant les assises du Nord, Dino Scala, surnommé le "violeur de la Sambre", a invoqué vendredi à la barre un "instinct chasseur, prédateur" pour justifier 30 ans de viols et agressions sexuelles. A la barre, l'accusé a reconnu avoir "commis des agressions sexuelles et des viols".

Dino Scala, surnommé le "violeur de Sambre, a invoqué vendredi un "instinct chasseur, prédateur" pour expliquer 30 ans de viols et agressions sexuelles, au premier jour de son procès vendredi devant les assises du Nord. A la barre, l'accusé reconnaît avoir "commis des agressions sexuelles et des viols" comme il l'avait fait pendant l'enquête sur "la majorité des faits", selon son avocate. A 61 ans, il comparait pour 17 viols, 12 tentatives de viol et 27 agressions ou tentatives d'agression sexuelle, commis contre 56 victimes entre 1988 et 2018.

"À côté (...), j'ai toujours eu une vie normale"

"Vous vous sentiez fort ?", l'interroge une avocate : "Oui, fort, je prenais le dessus", répond-il. Au président de la cour qui rappelle que selon l'enquête, il n'est "pas spécialement porté sur le sexe", il lance : "oui, c'est bizarre". "A côté de ça (...) de ce que j'ai pu accomplir comme méfaits, j'ai toujours eu une vie normale", ajoute cet ancien ouvrier et entraîneur local de football, très disert sur ses souffrances et frustrations passées, mais glissant sur les faits.

"Nous allons demander à cet homme, vraiment, la sincérité", avait déclaré avant l'audience Me Emmanuel Riglaire, avocat de deux parties civiles, dont l'une venue "à reculons". Pour Me Caty Richard, avocate de trois d'entre elles, les victimes "espèrent pouvoir enfin mettre un point final à ce qui leur est arrivé".

L'une des victimes présentes se disait "stressée" et "impatiente"

Parmi elles, Mélanie, agressée à 14 ans en 1997, se disait à la fois "stressée" et "impatiente" juste avant l'ouverture de l'audience. Même si elle n'espère pas "la vérité", elle compte sur le procès pour se "reconstruire après". "J'ai cru longtemps qu'il était là, en bas de chez moi, en train de me surveiller et puis qu'il allait finir son travail parce qu'il m'avait dit qu'il me tuerait si je criais", se remémore-t-elle, retenant ses larmes.

Au micro d'Europe 1, Valérie regrette le manque d'explications fournies par l'accusé. "En fait, il dit ce qu'il a toujours dit à tout le monde. Il a besoin de dire des choses mais apparemment il ne peut pas s'exprimer ou alors il ne veut pas. Mais nous non plus, on n'a pas d'explications or c'est ce que l'on est venu chercher. On ne veut ni pardon, ni excuse. Ce qu'il a fait ne pourra pas être défait", considère-t-elle. 

Le président du tribunal a souligné en début d'audience que trois psychologues étaient présents dans la salle "à disposition des victimes qui en auraient besoin". Le terrain de chasse imputé au "violeur de la Sambre" s'étend sur un rayon de moins de 30 km autour de cette rivière, qui traverse la frontière franco-belge.

La police avait multiplié les investigations

L'enquête, tentaculaire, débute fin 1996 avec la plainte pour viol, le long d'une voie rapide à Maubeuge, d'une femme de 28 ans : un homme est sorti de l'ombre, lui a demandé s'il lui "avait fait peur", avant de l'entraîner dans un taillis. Son sperme est trouvé dans l'herbe. D'autres agressions suivent, presque toujours à l'aube, en hiver, généralement sur la voie publique. Même mode opératoire : l'homme les saisit par derrière, les étrangle avec l'avant-bras ou un lien, pour les traîner à l'écart. Il les menace, souvent à l'aide d'un couteau. Plusieurs diront avoir "vu la mort".

La police multiplie les investigations des années durant, compare les ADN, quadrille la zone, sans succès. Un premier non-lieu est prononcé en 2003. L'affaire rebondit en 2006 après des agressions en Belgique. D'autres plaintes plus anciennes sont alors rapprochées du dossier. Mais le coupable demeure introuvable. Type européen, brun, taille moyenne: "on avait un signalement banal, une voiture banale", et surtout "un ADN qui ne matchait pas", l'individu n'étant pas connu des services, se souvient Romuald Muller, directeur zonal de la police judiciaire de Lille.

Scala avait avoué une quarantaine d'agressions

La traque tourne en rond. Jusqu'à l'agression d'une adolescente en février 2018 à Erquelinnes (Belgique). La vidéosurveillance capture une Peugeot 206. Son conducteur, Dino Scala, père de cinq enfants, est arrêté quelques semaines plus tard à Pont-sur-Sambre. Son entourage, stupéfait, le décrit comme "gentil". Couteau, cordelettes, gants sont retrouvés lors des perquisitions. Son ADN est présent sur plusieurs scènes de crime.

En garde à vue, il avouera une quarantaine d'agressions, invoquant des "pulsions" incontrôlables, mais en conteste "une quinzaine", selon son avocate. L'enquête dessine le profil d'un "prédateur" à la vie "organisée autour" de ses crimes. "J'observais où les femmes passaient". "J'aime être furtif, me dissimuler", avouera-t-il pendant l'instruction, évoquant, déja, une "nature de chasseur".