Violences faites aux enfants : des services sociaux sur la brèche

Les violences faites aux enfants sont difficilement évaluées. LOIC VENANCE / AFP
Les violences faites aux enfants sont difficilement évaluées. © LOIC VENANCE / AFP
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Eve Roger, édité par TLM , modifié à
Mercredi, le ministère des Familles lance un vaste plan de mobilisation contre les violences faites aux enfants, doublé d'une campagne sur les réseaux sociaux, pour endiguer un fléau préoccupant.
L'ENQUÊTE DU 8H

Fiona, Tony, Yanis… Des prénoms qui résonnent dans les mémoires. La mort de ces enfants avaient provoqué une vive émotion en France, parce qu’ils ont été victimes des violences de leurs parents. Pour y faire face, le ministère des Familles lance mercredi un vaste plan de mobilisation et de lutte contre les violences faites aux enfants. Avec également une campagne numérique organisée sur les réseaux sociaux. L'objectif est de mieux faire connaitre le 119, le numéro anonyme et gratuit de Allô Enfance en danger, destiné à signaler une situation où un enfant semble courir des risques.

90 appels par jour. Loin d'être marginales, ces violences peuvent conduire à la mort dans certains cas : en 2016, la police et la gendarmerie ont dénombré 68 enfants de moins de 15 ans victimes de violences mortelles dans le cadre de leur famille. Un chiffre qui ne prend pourtant pas en compte ni les nourrissons, dont il toujours difficile de déterminer la cause du décès, ni les plus de 15 ans.

Pour les enfants en danger, le numéro d’urgence 119 reçoit un nombre d’appels assez stable depuis les années 2010 : 33.000 par an. Par jour, cela représente 90 appels. Dans la moitié des cas, les équipes du 119 déclenchent une "information préoccupante", l'équivalent des anciens "signalements" auprès des services sociaux des départements. Depuis 2012, le nombre de ces informations préoccupantes a doublé ; ce qui pourrait à la fois s'expliquer par une recrudescence d’enfants maltraités et par une meilleure connaissance du 119, avec des appels plus nombreux. Près de 40% des appels viennent des membres de la famille elle-même et 10% des enfants.

Des informations préoccupantes transmises aux services sociaux. Chaque jour, au 119, 45 personnes répondent aux appels pour écouter, rassurer et transmettre des conseils. Au bout du fil, par exemple, une tante s'inquiète pour sa nièce de 6 ans, qui vit avec sa mère et son nouvel ami. Claire lui demande des détails sur la situation : "Quand vous dites qu'elle s'alcoolise, c'est aussi le cas en présence de votre nièce ? Vous craignez des disputes ? Ah, il lui a tapé dessus. Devant l'enfant ?". La psychologue va ensuite la conseiller sur les démarches à suivre. "C'était un appel où il n'y avait pas beaucoup d'éléments factuels, c'est compliqué d'évaluer s'il y a une situation de danger ou pas. La mère pourrait nous appeler et nous donner davantage de détails", analyse-t-elle.

Dans d'autres cas, les faits semblent plus graves. Un adolescent appelle le 119 pour signaler qu'un de ses amis est aux urgences, le bras cassé par ses parents qui le battent depuis l'enfance. Un scénario qui pourrait être inventé, mais Claire "doit" transmettre le dossier au vu de la gravité des faits. Elle va transmettre en urgence une information préoccupante aux services sociaux du département, qui vont immédiatement appeler l’établissement de l'adolescent et essayer de rentrer en contact avec lui. Environ 200 fois par an, le 119 contacte directement la police ou les pompiers en cas d’extrême urgence.

Aide éducative ou sociale. Mais la situation reste problématique : les Français ne sont pas assez mobilisés et ne signalent pas assez les situations graves. Une démarche qui peut être assimilée à de la délation, alors qu'en réalité, il s'agit de sauver une famille en lui apportant une aide éducative ou sociale. D'où la nécessité de cette campagne de prévention pour faire connaître le 119.