Théories du complot : "Il est hors de question de stigmatiser un public"

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T.M. , modifié à
Selon un sondage publié dimanche, près de huit Français sur dix adhèrent au moins à une théorie du complot. "Une méfiance généralisée" pour Benjamin Amar, professeur d'histoire-géographie au lycée.
INTERVIEW

C'est un "phénomène social majeur" et "préoccupant". D'après une étude de l'Ifop pour la Fondation Jean Jaurès et l'observatoire Conspiracy Watch, publiée dimanche, près de huit Français sur dix adhèrent à au moins l'une des grandes théories du complot. Si la jeunesse semble particulièrement touchée, "il est hors de question de stigmatiser un public", prévient sur Europe 1 Benjamin Amar, professeur d’histoire-géographie au lycée Gutenberg de Créteil, en Seine-Saint-Denis. "J'ai pu aussi entendre dans mon entourage ce même genre de réactions", souligne-t-il.

La jeunesse particulièrement concernée. Selon cette étude, 19% des Français considèrent notamment qu'à propos des attentats contre Charlie Hebdo et le magasin Hyper Cacher en janvier 2015, "des zones d'ombres subsistent" et qu'il n'est pas certain qu'ils aient été "planifiés et réalisés uniquement par des terroristes islamistes". Chez les moins de 35 ans, le chiffre monte même à 27%, et à 30 % chez les 18-24 ans.

Comment lutter contre le complotisme à l'école. Chaque année, Benjamin Amar doit ainsi faire face aux questionnements de ses élèves. "Lorsque vous leur demandez quelles sont leurs sources, vous avez quasiment systématiquement des documentaires ou des vidéos qui circulent sur Internet. La meilleure manière de lutter contre ça, quel que soit le sujet, c'est d'aborder un débat d'éducation civique interactif et donc de leur demander quelles sont leurs sources. Là, vous passez un bout de vidéo et vous déconstruisez le discours en direct", explique-t-il sur Europe 1.

 

"Que les médias prennent leur part de responsabilité". Selon lui, "cette crédulité-là se fait sur le terreau de l'ignorance". Et l'enseignant d'histoire-géo d'enjoindre : "Il faut aussi que les médias prennent leur part de responsabilité sur le sujet". Selon le sondage de l'Ifop, 9% des interrogés estiment que "leur rôle est essentiellement de relayer une propagande mensongère nécessaire à la perpétuation du 'Système'". Enfin, 36% trouvent que "leur marge de manœuvre est limitée et ils ne peuvent pas traiter comme ils le voudraient certains sujets" car ils sont "largement soumis aux pressions du pouvoir politique et de l'argent".