EXCLUSIF - Mort de la gendarme Myriam Sakhri : sa sœur ne veut pas "lâcher l'affaire"

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Gwladys Laffitte, édité par Océane Herrero , modifié à
En 2011, la gendarme Myriam Sakhri était retrouvé morte dans sa caserne, à Lyon. Après une première procédure ouverte pour harcèlement et meurtre qui s'était conclue avec un non-lieu en 2015, sa famille a apporté à la justice de nouveaux éléments, qui doivent être examinés par la cour d'appel de Lyon, mardi. Au micro d'Europe 1, la sœur de la jeune femme dit son espoir que l'enquête rebondisse.

Une balle dans l'abdomen, son arme de service à ses pieds. En septembre 2011, la gendarme Myriam Sakhri, 32 ans, est retrouvée morte dans sa caserne de Lyon. De son vivant, elle avait fait part à son entourage de faits présumés de harcèlement sur son lieu de travail. L’enquête qui devait éclaircir les circonstances de sa mort, et qui a duré six mois seulement, avait conclu à un suicide pour raisons personnelles. Mais neuf ans plus tard, la famille a produit de nouveaux éléments pour faire rouvrir les investigations pour harcèlement et homicide involontaire. Ils sont examinés ce mardi par la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Lyon. Au micro d'Europe 1, la sœur de la gendarme, Hassina Sakhri, raconte en exclusivité son "combat". 

La famille pointe du doigt un harcèlement

"Nous attendons qu'une nouvelle enquête pour des faits de harcèlement soit menée. Nous avons des témoignages de gendarmes, de collègues qui nous montrent que l'enquête menée par l'IGGN - des gendarmes qui enquêtent sur des gendarmes, donc - n'a pas été menée avec impartialité", fait valoir Hassina Sakhri.

Les proches de Myriam ont ainsi recueilli des dizaines de témoignages d’anciens collègues. Ils attestent d’un harcèlement au travail, d’insultes, de racisme, et surtout d’une mise à l’écart de Myriam au sein de la caserne durant les six mois qui ont précédé sa mort. Et ce, sans recevoir de soutien de sa hiérarchie. Me Vincent Brengarth, l’un des avocats de la famille, affirme même que ses supérieurs s’en seraient pris à elle. "Ma sœur, de son vivant, avait dénoncé certaines pommes pourries dans sa caserne. Elle n'a pas eu de soutien, elle a été écartée, menacée. De plus, une des premières personnes dénoncées par ma sœur a aussi été l'une des premières devant son corps encore chaud. Ça pose problème", renchérit Hassina Sakhri.

Autre élément qui interroge la famille de Myriam Sakhri : une paire de lunettes masculines, retrouvée chez la gendarme et dont le propriétaire n'a pas été identifié. Mais également un mot : "Merci à G. le connard!", désignant son supérieur, le colonel qui commandait le groupement du Rhône à l'époque.

Procédure classée sans suite

Après les faits, une enquête pour harcèlement et discrimination a bien été ouverte mais la procédure a été classée sans suite, le 9 mars 2012. A ce moment-là, c'est la thèse du suicide qui est retenue. Quelques mois plus tard, la famille choisit de se constituer partie civile. Une information judiciaire est ouverte pour harcèlement et meurtre.

Le 31 octobre 2013, le juge d'instruction rend un non-lieu, confirmé en appel le 29 juillet 2014 puis par la Cour de cassation le 21 octobre 2015. Les magistrats écartent les accusations de harcèlement. "Dans un contexte de forte alcoolisation", Myriam Sakhri se serait suicidée car elle venait d'apprendre sa prochaine comparution en correctionnelle pour des faits dénoncés en interne, concluait la chambre de l'instruction il y a six ans et demi.

"Nous ne lâcherons pas l'affaire"

La famille de Myriam Sakhri en est pourtant convaincue : la mort de la gendarme est directement liée au climat qu'elle supportait au travail, ponctuée selon la victime d'insultes et de remarques racistes. Ses proches espèrent désormais qu'une nouvelle enquête sera ouverte, appuyée dans cette demande par le parquet général. "La colère s'est changée en désir de mener ce combat de façon constructive. Cela fait plus de neuf ans que l'on est en contact avec des gendarmes qui sont harcelés", fait valoir Hassina Sakhri. "Myriam était une lanceuse d'alerte, mais c'est un combat pour tous les gendarmes. Nous sommes confiants et déterminés, et nous ne lâcherons pas l'affaire".