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Thibauld Mathieu , modifié à
Chez Olivier Delacroix jeudi, Sylvie, 62 ans, évoque le conflit qui l'oppose à sa fille aînée. Un conflit né lorsque la mère de famille a décidé d'épouser son nouveau conjoint.
VOS EXPÉRIENCES DE VIE

Dans les années 1980, Sylvie, aujourd'hui âgée de 62 ans, fait le choix d'adopter deux enfants. Sa relation avec Sabrina, sa fille aînée est fusionnelle. Jusqu'à ce qu'elle lui annonce son mariage avec son nouveau conjoint, Robert. Cela fait maintenant plusieurs années que les deux femmes n'ont plus de contact, comme elle le raconte à Olivier Delacroix, jeudi.

"Elle s'est sentie dépossédée de sa maman"

"En 2003, quand Robert a commencé à vivre avec moi, Sabrina a changé. Je pense qu'elle a pris ombrage et pensé que Robert prenait une partie de mon cœur. Et même si elle était devenue maman et qu'elle n'était plus à mon domicile, je sentais qu'elle détendait les liens, bien qu'elle me laissait toujours ses filles et qu'elle parlait beaucoup avec moi. Et en 2007, à l'annonce de notre mariage, ça a carrément été l'abandon dans sa tête et dans son cœur. Je n'ai pas compris ses réactions.

 

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Il n'y avait pas de demandes de sa part, mais des codes que je n'ai pas su évaluer. Elle était elle-même en difficulté dans son couple, j'ai été présente autant qu'elle le demandait, j'allais à sa rencontre aussi souvent que possible, comme auparavant, mais elle a creusé l'espace entre elle et moi parce qu'elle s'est sentie dépossédée de sa maman avec l'arrivée de Robert. Abandonnée à l'orphelinat, abandonnée quand je l'ai retirée de l'orphelinat avec mon époux, elle s'est sentie à nouveau abandonnée…

"Ce qui manquait, c'était le dialogue"

Nous avons demandé une médiation familiale, puisqu'elle a cessé de nous donner les enfants à garder. Et elle m'a dit : 'je ne te reparlerai que le jour où tu seras divorcée', 'je vais te pourrir la vie', et "tu n'as été que ma nourrice, maintenant, je vais t'appeler Sylvie'. Ça a été le coup de poignard. Je me suis dit qu'elle était en colère, comme tout enfant, qu'il fallait que j'entende sa colère, mais je ne savais pas comment désamorcer ça. Ce qui manquait, c'était le dialogue. J'étais prête, mais elle, elle se repliait et n'avait plus envie de ce dialogue. Je pense pourtant que cela aurait été nécessaire pour la rassurer.

C'est douloureux de part et d'autre parce que la médiation est restée sans réponse. Notre avocat nous a dit de voir si une démarche vers le tribunal allait éclaircir la situation. Les choses n'ont fait qu'empirer, parce qu'elle s'est sentie attaquée. Et quand on parle de partie adverse pour désigner son enfant, ça fait très mal. Il a notamment fallu justifier par des attestations que j'étais une bonne maman et une bonne grand-mère. C'est douloureux… Cela l'a sans doute aussi été pour elle.

"J'espère que mes petites-filles reviendront peu à peu vers nous"

Aujourd'hui, je me dis que j'ai semé de l'amour, j'espère en récolter, même si la récolte est tardive. Le temps passé ne se rattrape pas, mais maintenant, Sabrina a cinq enfants, dont trois que je ne connais pas. L'année prochaine, Léa, l'aînée, sera majeure. Elle a beaucoup été présente dans notre vie, car Sabrina nous l'a beaucoup laissée. J'espère que toutes reviendront peu à peu vers nous, ne serait-ce que par curiosité de connaître cette mamie qu'elles n'ont pas connue ou qu'elles ont perdue de vue. Elles sont dans leur enfance, dans la construction de leur adolescence et leur vie avec leur maman. Je souhaite qu'elles soient heureuses, mais il y a un manque, parce que les racines, ce que peuvent apporter les grands-parents, c'est essentiel à la construction d'un enfant."

Son nouveau conjoint, Robert, vit à peu près la même situation avec son fils, qui ne lui donne plus de nouvelles de ses petites-filles. Au micro d'Olivier Delacroix, il témoigne également.

"Mon fils, du jour au lendemain, ça a été silence total. Je pense que c'est sans doute lié à mon mariage, au fait que sa mère a très mal vécu la séparation, je n'en sais rien, (…) il n'y a jamais eu d'explication. Quand nous l'avons invité à notre mariage en 2007, il a appelé en disant qu'il ne viendrait pas. Je lui ai dit que je pouvais comprendre. Il en a profité pour me dire que ses filles avaient été baptisées. Je lui ai répondu qu'il aurait quand même pu me prévenir, que ce n'était pas normal d'agir comme ça. Il a raccroché, et depuis, je n'ai plus aucune nouvelle, je ne sais même plus où il habite, je ne sais pas où il travaille…

Je ne lui en veux pas vraiment, mais je déplore fortement cette attitude. Je le vis différemment car il n'y a pas eu d'agression alors que Sabrina a fortement agressé sa mère, y compris dans la rue, y compris par coups de téléphone intempestifs, y compris par messages sur Facebook, ce qui n'est pas le cas de mon fils.

Mais cela nous a particulièrement soudés avec Sylvie. Et l'amour que je lui porte n'a jamais été aussi fort que pendant cette période difficile."