Recensement des migrants dans les centres d'hébergement : “Les associations ont un principe d’accueil inconditionnel”

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R.D. , modifié à
Invitée d’Europe 1, Véronique Fayet, présidente du Secours catholique, a vivement critiqué dimanche les intentions du gouvernement en matière de politique migratoire.
INTERVIEW

C’est un texte qui n’a pas encore été dévoilé mais qui nourrit déjà les polémiques. Le ministère de l’Intérieur prépare une loi sur l’immigration, annoncée comme restrictive au point d’avoir déjà commencé à former des remous au sein de la majorité. Lundi, le Secours catholique et la Fédération de l’Entraide protestante ont adressé un courrier commun à Emmanuel Macron pour lui faire part de leurs inquiétudes face à ce qu’ils considèrent comme "un renoncement sans précédent aux valeurs et aux traditions humanistes". En tête de leurs griefs : la mise en place d’un recensement des migrants dans les centres d’accueil d’urgence, de manière à réorienter ces personnes vers d’autres structures. “Les associations ont un principe d’accueil inconditionnel. C’est à dire que quand on est dans un centre d’hébergement, on est à l’abri et on doit pouvoir être totalement protégé !”, a tenu à rappeler dimanche Véronique Fayet, présidente du Secours catholique-Caritas France, et invitée du Grand Rendez-vous d'Europe1/CNews/Les Echos.

Des consultations pour élaborer la loi. "On a une grosse difficulté de communication avec le gouvernement qui prépare pour le début de l’année une loi asile et immigration dont on ne sait pas grand-chose parce qu’il n’y a pas de concertations", regrette la responsable associative. "On voudrait vraiment que le gouvernement entende notre demande de concertation et de participation. Il ne peut pas assumer seul une politique migratoire, ça concerne toutes les couches de la société", martèle-t-elle, alors que le Premier ministre a annoncé jeudi le lancement d’une "consultation" à compter du 11 janvier.

Un discours faussé. Véronique Fayet estime par ailleurs que la France "est très timide" en matière d’accueil. "Ce qui me désole, c’est que le discours de l’extrême droite a contaminé l’ensemble des médias et des politiques. On parle d’invasion migratoire et de millions de personnes. Forcément, ça fait peur, et puis on fait des amalgames terribles avec l’islam radical et le terrorisme", dénonce-t-elle. "En fait, on n’accueille que quelques milliers de personnes, c’est très peu".

"Les Français sont accueillants ; on le vérifie tous les jours. Les gens font preuve d’une générosité incroyable", assure-t-elle, en citant notamment la mise en place de mécanismes d’accueil de migrants à domicile dans plusieurs villes. "On ne peut pas dire qu’il y a des bons migrants - ceux qui arrivent de Syrie ou Érythrée, qui sont persécutés et en danger de mort -, […] et puis, de l’autre côté, des migrants économiques, qui seraient des mauvais migrants", s’agace encore la présidente du Secours catholique. "Ça n’est pas si simple que ça".

Un phénomène qui va s’accentuer. Pour elle, il est essentiel d’avoir un discours objectif et serein sur ces sujets car "il faut expliquer aux Français que cette question migratoire est devant nous. Elle touche actuellement 250 millions de personnes dans le monde. La majorité de l’immigration se fait entre les pays du sud. Nous n’en voyons que très peu. Relativisons les choses. Mais ça ne fera que croître."

"On veut que le président Macron pose sur la table, l’année prochaine, un vrai débat, avec les vrais chiffres, en disant la vérité aux Français", répète Véronique Fayet. "Il ne s’agit pas d’accueillir toute la migration du monde", conclut-elle.