Procès pour tentative d'assassinat en Corse : "une chape de plomb pèse sur Ajaccio"

Le procès en appel de deux hommes accusés de tentative de meurtre s'ouvre jeudi à Aix-en-Provence (photo d'illustration).
Le procès en appel de deux hommes accusés de tentative de meurtre s'ouvre jeudi à Aix-en-Provence (photo d'illustration). © AFP
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Alain Acco avec , modifié à
Deux hommes accusés d'avoir tiré sur un ancien nationaliste corse et sa famille sont jugés en appel à partir de jeudi, à Aix-en-Provence. Ecœurés de l'acquittement prononcé en première instance, les victimes ont décidé de boycotter le procès. 

Le banc des parties civiles sera vide, à partir de jeudi, devant la cour d'assises des Bouches-du-Rhône. Il y a sept ans, la triple tentative d'assassinat pour laquelle deux hommes sont jugés en appel avait pourtant horrifié la Corse. Mais l'acquittement prononcé en première instance a écœuré les victimes, qui ont décidé de boycotter les débats. 

Acquittés malgré un témoignage. Les faits remontent à 2011, à Ajaccio. Yves Manunta, une figure du nationalisme corse, circule en voiture avec sa femme et sa fille de 10 ans lorsque deux hommes tirent à de nombreuses reprises sur le véhicule. Une cinquantaine d'impacts de balles seront relevés sur les lieux. Les trois occupants de la voiture survivent mais l'épouse et la fille du nationaliste sont blessées. La première restera handicapée. 

La fille d'Yves Manunta reconnaît l'un des tireurs : il s'agit d'un ancien ami de la famille. Mais malgré son témoignage et de nombreux indices, l'homme et son frère jumeau sont acquittés en 2016, lors du procès en première instance. Entre temps, le nationaliste a été tué dans une nouvelle fusillade, quelques mois après la première. 

"Comme si on faisait un article sur Nordahl Lelandais". "Une chape de plomb pèse sur Ajaccio", déplore Stéphane Manunta, le fils d'Yves, interrogé par Europe 1 avant le procès en appel. De l'audience en première instance, l'homme conserve le souvenir du "courage" de sa petite sœur, alors âgée de 16 ans, "qui se tenait debout, à visage découvert, à 3 mètres de ses agresseurs". "Le problème, c'est qu'en Corse, on écoute plus souvent la parole d'un repenti que celle d'une victime", assène celui qui vit désormais en exil sur le continent, inquiet pour sa propre sécurité. 

"Ce n'est pas notre presse régionale qui va les contrarier", poursuit le fils d'Yves Manunta, citant l'exemple d'un article publié il y a quelques jours "avec Marc Pantalacci (l'un des accusés, ndlr) en costume, le qualifiant de nouveau cadre jeune et dynamique de la poissonnerie familiale". "Ces gens ont détruit des familles, il faut un minimum de décence", estime-t-il. "C'est comme si on faisait un article sur Nordahl Lelandais, maître chien doux et affectueux, éleveur à domicile. On est chez les fous."

"Nous boycottons notre propre procès". "Ce n'est pas avec un témoignage émouvant qu'on va faire changer d'avis la cour", conclut Stéphane Manunta. "Il y a d'autres preuves, d'autres éléments matériels, qui font que le doute n'est pas permis. Nous boycottons notre propre procès et c'est paradoxalement le seul moyen que nous avons pour nous faire entendre." À l'audience en appel, la famille ne sera même pas représentée par un avocat.