Bar, Campigny, Victor Dhollande / Europe 1, 1280 3:49
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, édité par Grégoire Duhourcau
La France compte aujourd'hui seulement 34.000 bistrots contre 200.000 en 1960. Leur activité principale ne leur suffit plus pour dégager un chiffre d'affaires suffisant, ce qui les pousse à multiplier les offres de services pour survivre.
REPORTAGE

Les bistrots sont en trains de mourir en France. Ils étaient 200.000 en 1960. Aujourd'hui, ils ne sont plus que 34.000. L'activité des bars ne leur suffit plus pour survivre, ils doivent donc multiplier les services comme la vente de tabac et de jeux à gratter. En Normandie, dans l'Eure, la désertification est palpable. Les villages fantômes, sans commerce, sont de plus en plus nombreux. Mais il y a quand même des "résistants" avec des hommes et des femmes qui s’accrochent pour maintenir un bistrot dans leur commune.

"On est obligé de faire plusieurs choses parce que sinon, on ne peut pas vivre". À Foulbec, un petit village de 600 habitants, il y a une église, une école et un seul bar. Depuis 6h30 du matin, Fabienne, la patronne, sert des cafés, enchaîne les commandes et bien d’autres services. "On est obligé de faire plusieurs choses parce que sinon, on ne peut pas vivre. Le bar, ça ne marche pas. Il y a le tabac, il y a la presse, l'épicerie, le pain, le gaz, tout ce qui est recharges téléphoniques et puis le jeu", explique-t-elle sur Europe 1. Chaque activité, c’est un petit complément de revenu qui lui permet de survivre. Son bar fonctionne à merveille. Manu et Alain s’y retrouvent tous les jours à 10 heures pour boire une bière. "Ça nous fait une sortie, on est à la retraite, ça nous permet de prendre un café tranquillement avec des amis, des copains. Les petits bars de commune, c'est impératif que ça reste", juge l'un. "Si ça meurt, il n'y a plus rien. C'est ça qui est moche", ajoute l'autre.

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À une dizaine de kilomètres de là, à Campigny, le "Bar de la Pelouse" est installé au cœur du village. Valérie et Laurent, qui l’ont repris il y a cinq ans, ont ouvert une brasserie le midi. Ils travaillent plus de 70 heures par semaine et quand ils ont payé leur loyer, il ne leur reste pas grand-chose. "Quand tout va bien, on arrive à se faire 500 euros de paie chacun", confie Laurent. Mais pour Denis, le comptoir du bistrot est un lieu de sociabilisation très important : "Pour moi, c'est un réseau social humain." "Si ça disparaît, il n'y aura plus du tout d'activité, plus de relations, plus de contacts. En dehors des vœux du maire en début d'année, on ne se connaît pas", raconte un autre client. 

L'importance des pouvoirs publics dans ce combat. Pourtant, Valérie et Laurent cherchent des solutions pour ne pas mettre la clé sous la porte. Ils vont bientôt organiser des concerts dans leur bar pour attirer de nouveaux clients. Les pouvoirs publics ont également un rôle à jouer dans ce combat. Pour les maires des petites communes rurales, maintenir un commerce représente un enjeu très important. Ils essaient donc de trouver des parades pour sauver leur bistrot. Pour cela, il existe des exemples concrets comme l’explique Cédric Zabo, directeur de l’Association des maires ruraux de France : "Par exemple, reconvertir un local dans la rue du village, qui était peut-être l'ancien café et se dire : 'On y va, on fait confiance.' Chacun essaie de trouver des astuces, un bout de subvention, souvent de la main-d'oeuvre aussi."

Il y a aussi ces maires qui aident un nouveau gérant à reprendre un café en avançant le loyer sur le budget de la commune. Et puis, il existe des idées encore plus originales. En Moselle, un bar dans un village accueille un notaire qui tient une permanence une fois par semaine pour donner des conseils aux habitants. Dans une autre commune, le bar assure les repas de la cantine scolaire. Enfin, il y a les acteurs privés qui font le pari de la ruralité comme France Boissons, qui rénove des bars, ou Orange, qui installe le réseau Internet dans des troquets. Ce n’est jamais totalement désintéressé mais comme le confie un jeune maire, "tous les moyens sont bons pour sauver le bar qui est l’âme de nos villages".