Pour la sœur d'une victime, "Abdelkader Merah est dans la dissimulation"

  • Copié
A.H. , modifié à
Radia Legouad, sœur de Mohamed Legouad, militaire tué à Montauban par Mohamed Merah, est revenue au micro d'Europe 1 sur les cinq semaines de procès d'Abdelkader Merah.
INTERVIEW

Abdelkader Merah, le frère de Mohamed Merah, a été condamné à la peine de 20 ans de réclusion criminelle, assortie d'une période de sûreté des deux tiers. La cour spéciale de Paris a considéré que ni Abdelkader Merah ni Fettah Malki, soupçonné d'avoir fourni un gilet pare-balles et un pistolet mitrailleur au tueur au scooter, ne pouvaient être considérés comme des complices de Mohamed Farah Chemsedine Merah. Pour Radia Legouad, sœur de Mohamed Legouad, militaire tué à Montauban, il s'agit là d'un "verdict partiel".

"J'espère que la cour n'a pas été naïve". Épuisée, éprouvée par ces cinq semaines de procès qu'elle a suivies du début à la fin, Radia Legouad respecte ce verdict, en espérant que la cour n'a pas été "naïve". "On espérait que l'intime conviction et le réquisitoire de l'avocate générale fassent la différence. Ce sont des magistrats professionnels qui ont jugé, ils ont appliqué le droit (…) J'espère que la cour n'a pas été naïve. Des gens comme ça peuvent être très dangereux, ils nous l'ont prouvé, ils nous le prouvent encore, et il y a de quoi avoir peur", a-t-elle estimé dans la matinale d'Europe 1, vendredi. 

"Il n'y a pas de hasard". Pour Radia Legouad, Abdelkader Merah "est dans la dissimulation". "Je pense sincèrement qu'il dissimule quelque chose. Ils (Mohamed et Abdelkader Merah) se sont retrouvés systématiquement lors des repas, au moment des attaques et des tueries. Il n'y a pas de hasard", estime-t-elle. Au dernier jour du procès, et avant que la cour ne se retire pour délibérer, le frère de Mohamed Merah a de nouveau clamé son innocence. Sans adresser un mot aux familles des victimes. "J'aurais attendu de sa part que, juste pour le nom qu'il porte, il fasse un semblant d'excuses. Qu'il se tourne vers nous, qu'il exprime quelque chose… Mais lui, il ne se rabaisse pas à ça, ce n'est pas ce en quoi il croit", déplore Radia Legouad. 

Dupond-Moretti a parfois manqué de dignité à notre égard. Maintenant, il a été professionnel, il a fait son job, on ne peut pas le lui reprocher

Dupont-Moretti "a fait son job". Le verdict a été reçu très durement par certaines parties civiles, notamment Latifa Ibn Ziaten, la mère d'un des militaires tués, qui a exprimé sa colère et son incompréhension. À la sortie de la salle d'audience, l'un des avocats d'Abdelkader Merah, Me Eric Dupond-Moretti, a été poursuivi et hué. Une réaction à laquelle Radia Legouad n'apporte aucunement son soutien. Pour elle, le conseil a "fait son travail". "Il ne faut pas tout mélanger. Il ne défend pas les meilleurs dossiers. J'ai moi-même dit qu'il avait parfois manqué de dignité à notre égard, je le maintiens. C'est allé jusqu'au manque de courtoisie, puisqu'il ne nous disait pas bonjour. Maintenant, il a été professionnel, il a fait son job, on ne peut pas le lui reprocher".

Pas prête pour un second procès. Pendant ces cinq semaines de procès particulièrement intenses, Radia Legouad a eu le sentiment qu'on "remuait le couteau dans la plaie". "Ce sont des heures à entendre des détails douloureux, la balistique, les légistes…", glisse-t-elle, la gorge serrée. Elle ne se dit pas prête aujourd'hui à envisager un second procès, option d'ores et déjà envisagée par une partie des familles des victimes. "Mon frère méritait qu'on lui fasse cet hommage, qu'on le sorte de l'ombre, qu'on l'humanise, qu'on lui redonne son identité (…) On portera toujours le deuil et la douleur de cette perte. Mais c'est important d'aller de l'avant".

Retrouvez l'intégralité de l'interview ici :