PMA : le débat relancé par le comité d’éthique

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avec AFP , modifié à
Le CCNE rend mardi son avis sur l'extension de la procréation médicalement assistée aux couples de femmes et aux femmes seules. Favorable à la mesure, le gouvernement cherche à prévenir l'"hystérisation" du débat.
ON DÉCRYPTE

Le document devrait relancer un débat sensible et loin d'être clos. Le Comité consultatif national d'éthique (CCNE) rend mardi son avis sur les grands thèmes attendus dans la prochaine loi de bioéthique, dont le plus polémique sera scruté de près : il concerne la procréation médicalement assistée (PMA) et son ouverture aux couples de femmes et aux femmes seules. Selon toute vraisemblance, l'avis sera favorable à cette mesure. Il servira de base à l'exécutif, qui cherche à éviter que le sujet ne devienne aussi électrique que l'avait été le mariage pour tous à l'époque de François Hollande.

Quelle est la position du gouvernement ?

L'élargissement de la PMA était une promesse de campagne d'Emmanuel Macron, qui n'y voyait "aucun obstacle juridique" et s'engageait déjà à consulter le CCNE pour initier un débat "pacifié et argumenté". Dès le mois de juin 2017, l'instance s'est prononcée pour cette évolution, réclamée par les couples homosexuels au nom de l'égalité. La procréation assistée a encore été évoquée lors des "Etats généraux de la bioéthique", de janvier à avril 2018.

L'avis du Comité d'éthique est-il contraignant ?

Non. "Par le passé, certains avis ont été suivis, d'autres pas", expliquait en 2013 Najat Vallaud-Belkacem, alors porte-parole du gouvernement, déjà à propos de… la PMA. Le CCNE indique lui-même émettre "un certain nombre de propositions destinées à accompagner les débats qui vont s'ouvrir" : le gouvernement a prévu de présenter avant la fin de l'année un projet de loi qui sera débattu par le Parlement début 2019.

Quels sont les arguments des "anti" ?

"L'être humain n'est pas un objet de consommation", a martelé le père Brice de Malherbe, prêtre du diocèse de Paris, dimanche sur Europe 1. La Conférence des évêques (CEF) est l'un des principaux opposants à la mesure, mettant en avant l'importance de la "référence paternelle". Même son de cloche du côté de la Manif pour tous, qui qualifie la mesure de "PMA sans père".

Invitée du Grand Rendez-Vous, dimanche, la présidente du Rassemblement national, Marine Le Pen, a elle évoqué une mesure allant à l'encontre de "l'évolution législative dans ce domaine"."Pendant des décennies, le fait de connaître son père était quelque chose de fondamental, c'est la raison pour laquelle on a adapté la législation pour permettre les recherches de paternité qui étaient très difficiles avant", a-t-elle argué.

"La société a changé depuis 40 ans : le nombre de couples qui se multiplie, des familles monoparentales...", a répondu le professeur René Frydman, l'un des pionniers de la fécondation in vitro, interrogé par Europe 1. "On ne s'oppose pas, en tant que société, à ce qu'une femme seule ait un enfant", a-t-il estimé.

Quel lien avec la GPA ?

Aucun selon le gouvernement. "Ce n'est absolument pas la même problématique, arrêtons de tout mélanger", a balayé la ministre de la Santé Agnès Buzyn, vendredi. Mais l'épiscopat continue d'afficher ses craintes que l'argument de l'égalité ne conduise à la "légalisation de la gestation pour autrui" (GPA), c'est-à-dire le recours aux mères porteuses, notamment pour les couples homosexuels. Emmanuel Macron ne s'est jamais prononcé en faveur de cette mesure.

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Et avec le mariage pour tous ?

"Il est encore trop tôt pour les appels à la mobilisation", a expliqué Ludovine de la Rochère, la présidente de la Manif pour tous, créée pour s'opposer au mariage homosexuel. Le mouvement a cependant appelé ses militants à se rassembler mardi devant les locaux parisiens du CCNE pour y brandir des "cartons rouges ou verts" selon l'avis rendu. Une posture affichée comme de la "vigilance", mais qui inquiète le gouvernement, soucieux de limiter la crispation autour de ce sujet. 

"Je souhaite que ce débat ne soit pas hystérisé", a notamment reconnu Agnès Buzyn. "La majorité des Français a une opinion partagée (...) et donc il faut qu'on apporte des explications au cours de ce débat parlementaire", a-t-elle ajouté.