L'affaire Duhamel "nous montre la réalité de l'inceste", estime une sociologue

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Ugo Pascolo
Alors que sort en librairies "La Familia Grande", l'ouvrage dans lequel le politologue Olivier Duhamel est accusé d'inceste par sa belle-fille, la sociologue Alice Debauche revient sur cette affaire au micro d'Europe 1. Pour cette spécialiste de ce type de violences, l'affaire Duhamel comporte tous les ingrédients de ce type d'affaire, dont la culpabilisation des victimes et l'imposition du silence.
INTERVIEW

C'est une affaire qui suscite l'effroi. Ce jeudi sort en librairies La Familia Grande, l'ouvrage de Camille Kouchner qui accuse son beau-père, le constitutionnaliste Olivier Duhamel, d'inceste sur son frère jumeau. Ce dernier fait d'ailleurs l'objet d'une enquête pour viol et agressions sexuelles depuis mardi, pour ces faits qui se seraient déroulés à la fin des années 1980. Une affaire qui "nous montre la réalité de l'inceste", estime Alice Debauche. Pour cette sociologue, invitée d'Europe Matin, bien qu'elle choque l'opinion publique l'affaire Duhamel "n'est pas très surprenante dans ces caractéristiques". 

"Tout y est"

"Tout y est", résume celle qui est également auteure d'une enquête qui porte notamment sur les faits d'inceste intitulée Violences et rapports de genre. Comme dans "la plupart des témoignages", on retrouve "la culpabilisation des victimes, l'imposition du silence pendant de très nombreuses années, les révélations pour protéger d'autres victimes potentielles, et puis l'incompréhension, l'incrédulité de l'entourage qui ne veut pas y croire et qui ne réagit pas".

Sur ce dernier point, Alice Debauche rappelle d'ailleurs que si on parle souvent du silence des victimes, qui "est relatif", "c'est plutôt qu'on ne veut pas les entendre". S'appuyant sur un documentaire "de la fin des années 1980 intitulé La conspiration des oreilles bouchées", la sociologue pointe que "bien souvent, les adultes et l'entourage qui refusent d'entendre. [...] Au sein des familles, on va garder le secret". Une omerta qui ne se met toutefois pas systématiquement en place, puisqu'"énormément de parents ou proches, une fois informés, vont agir". 

"La société, globalement, n'a pas envie de savoir"

Reste que ce silence pourrait être la principale raison expliquant le peu d'affaires d'inceste connues, alors qu'elles touchent pourtant un Français sur dix selon une enquête de l'association "Face à l'inceste". Mais pour la sociologue, ce tabou persiste aussi car "la société, globalement, n'a pas envie de savoir".

Car en sus de la violence, les affaires d'inceste "remettent en cause les représentations classiques de la famille comme lieu d'épanouissement et de préservation, et les représentations de l'enfant comme un être préservé dont les adultes cherchent à prendre soin". 

En cas de violences contre un enfant : composez le 119

Enfants, adolescents, adultes, victimes ou témoins d'actes de violences peuvent composer le 119, le numéro du service national d'accueil téléphonique pour l'enfance en danger (SNATED) pour donner l'alerte. L'appel est anonyme et gratuit. La plateforme est active 24h/24 et 7j/7. Plus de détails sur le site officiel du SNATED.