#Jesuismaltraitante : l'appel d'Anna Roy, sage-femme, pour plus de moyens dans les hôpitaux

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Europe 1 Studio
"Il faut une sage-femme dédiée à chaque femme qui accouche". Anna Roy, sage-femme, autrice du podcast Europe 1 Studio "Sage-Meuf" et chroniqueuse à la Maison des maternelles sur France 4, lance un appel pour de meilleures conditions de travail dans les hôpitaux et pour en finir avec les maltraitances que les soignants font subir aux femmes malgré eux. 

C'est un appel solennel adressé à Emmanuel Macron et Olivier Véran que lance lundi sur Europe 1, Anna Roy, sage-femme, autrice du podcast Europe 1 Studio "Sage-Meuf" et chroniqueuse à la Maison des maternelles sur France 4. Elle demande une sage-femme pour chaque femme qui accouche. Et dénonce les maltraitances qui découlent de la surcharge de travail actuelle. Maltraitance dont elle-même s’est rendue coupable. 

Anna Roy rappelle les conditions de travail des sages-femmes à l'hôpital : des gardes de 12h, durant lesquelles elles doivent s’occuper en même temps de 3 à 4 femmes qui accouchent, sans compter les urgences…

C’est à la suite de la réalisation du 7e épisode du podcast dédié à la naissance côté sage-femme, qu’elle a une prise de conscience. Dans cet épisode, son confrère Adrien Gantois, le président du Collège national des sages-femmes, se confie sur une garde traumatisante au cours de laquelle il a laissé seule une femme seule accoucher de son enfant mort. Et au moment de publier un post instagram pour faire la promotion de cet épisode sur les réseaux sociaux, tout remonte. Anna se souvient d’une garde où elle aussi a maltraité.

"C’est moi qui ait été maltraitante"

"Ce jour-là, j'accueille un joli couple. Ils ont la trentaine, adorables. J'avais envie de les accompagner même s'il y avait un boulot fou. Mais vite la situation se complique", se souvient Anna Roy. "Je pose le monitoring et je tombe sur un rythme cardiaque fœtal très pathologique. Je vois rapidement que ça ne va pas du tout et l'obstétricien me confirme qu'il faut qu'on césarise vite. La salle d'attente est pleine à craquer, mais j'y vais quand même. On fait naître cet enfant, qui va très mal sur le moment mais qui réussit à s'en tirer". 

Mais pour s'occuper de cet enfant, la sage-femme doit laisser ses parents, seuls, dans un profond désarroi. "Je me souviens ne pas avoir pris en charge la douleur de cette femme qui venait d'avoir une césarienne. Je l'ai laissé traîner dans des serviettes hygiéniques trempées de sang que l'on a pas pu changer, ni moi, ni les infirmières, ni les aides soignantes qui étaient présentes."

Anna doit aussi "abandonner" d’autres patientes. "Je n'ai pas pris en charge une femme qui accouchait sans péridurale et qui était venue seule car son mari l'avait quitté pendant la grossesse. Enfin, je ne me suis pas occupée d'une femme dont le travail n'avançait pas. Il aurait fallu que je l'amène aux toilettes, que je la 'posture', que je lui administre des médicaments...tout ca je ne l'ai pas fait et je sais qu'elle a eu des forceps, à cause de ça", déplore la soignante. "J'ai entraîné une cascade d'événements terribles malgré moi. Mais c'est bien moi qui ait été maltraitante. Je m'en suis excusée auprès des parents. Et le pire dans tout ça c'est qu'ils m'ont dit que j'avais été formidable. Mais je l'avais pas été. Pas du tout", regrette-t-elle. 

L’appel du "une femme = une sage-femme"

Ce témoignage, elle l’écrit sur Instagram. Rapidement, les messages, les commentaires affluent. "Ca va de la sage-femme, à l'infirmière à une policière, toutes sortes de professions différentes. Et puis, il y a aussi la réaction des patients qui disent merci. Vraiment, je ne m'y attendais pas", assure-t-elle. 

Elle se dit qu'il faut agir et poste une vidéo sur son compte Instagram avec un hashtag #jesuismaltraitante. Pour aller encore plus loin, une pétition est lancée. Aux côtés de quatre femmes, Clémentine Sarlat qui produit La Matrescence, Clémentine Galey productrice du podcast Bliss, Agathe Lecaron présentatrice de la Maison des maternelles et Alyson Cavaillé, fondatrice de la marque tajinebanane, Anna Roy en appelle à Olivier Véran, le ministre de la Santé mais aussi au président Emmanuel Macron et demande à ce que chaque sage-femme puisse s'occuper uniquement d'une femme qui accouche. Elle demande également plus de moyens pour l'hôpital. "Une femme par sage-femme, ce n'est pas absurde. En Angleterre, où il font attention à la dépense publique, c'est le cas. Ça n'a rien d'irréaliste".