BTP France 1:16
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William Molinié , modifié à
Après un ralentissement de leur activité en France, à cause de l’épidémie de Covid-19, les gangs issus de la communauté des gens du voyage irlandais sont de retour sur le territoire. Vols, escroqueries et trafics en tous genres sont la signature de ces équipes qui organisent des raids dans l’Hexagone.

Ils ont leurs propres codes et leur propre dialecte, le Shelta, un mélange de gaélique et d’Irlandais. Détectés dans les années 1990, les gangs irlandais issus de la communauté des gens du voyage se sont exportés partout en Europe. Si les "Irish Traveller’s" ont été reconnus comme minorité ethnique en 2017 par le gouvernement irlandais, une frange criminalisée s’est spécialisée dans les vols en série et les escroqueries. Ils agissent en famille, avec des chefs de clans dans une organisation très pyramidale.

Selon une récente note de la direction centrale de la police judiciaire (DCPJ), qu’Europe 1 a consultée, cette criminalité est "en progression régulière". Si l’épidémie de Covid-19 a eu comme conséquence le ralentissement de leur activité, "bien que certains groupes criminels organisés aient poursuivi leurs périples en contournant les restrictions de voyage", écrivent les policiers, l’année 2022 est repartie de plus belle.

Escroqueries et vols en tous genres

Dans ce décompte du service d'information, de renseignement et d'analyse stratégique sur la criminalité organisée (SIRASCO), les analystes établissent que l’année dernière, "816 individus irlandais ou de nationalité britannique ont été impliqués dans des actes délictueux en France", contre 616 en 2021, soit une augmentation de 32,5%. Dans le détail, c’est surtout la région Ile-de-France qui subit ce type de délinquance avec 3.260 faits recensés entre 2012 et 2022, puis le Nord (2.155 faits), le Sud (1.900 faits) et l’Ouest (1.336 faits).

De confession catholique, les gangs issus des "Irish Traveller’s" s’illustrent depuis des lustres par un mode opératoire bien à eux. Celui que les policiers ont surnommé l’escroquerie aux "faux bitumeurs", surtout recensé en zone peu dense, rurale et semi-urbaine. Ils se présentent aux victimes comme des employés du BTP et leur proposent de leur revendre à bon prix un surplus de goudron issu des chantiers. Les victimes sont surtout des personnes âgées et ne découvrent la supercherie qu’à l’issue. Comme cet Angevin qui a réglé la somme de 2.600 euros à deux hommes avec un fort accent anglais pour goudronner le chemin de sa propriété avant de s’apercevoir que l’asphalte n’était en fait que du gravier.

Bases d’accueil en France

Ces gangs, sédentarisés en Irlande, ont un mode de vie itinérant à l’étranger. Et embrassent désormais d’autres créneaux criminels, comme les escroqueries aux faux touristes sur les aires d’autoroute, les trafics de stupéfiants, d’ivoire, de cornes de rhinocéros ou de jade. Ils écument aussi par raids les trottoirs des villes pour voler les pots catalytiques qui contiennent des métaux rares. En février 2022, plusieurs "Irish Traveller’s" ont été interpellés en Ile-de-France, pour des vols commis dans la Marne, en Bourgogne et dans la vallée du Rhône.

Lors de leurs passages en France, ces criminels font halte dans des aires d’accueil des gens du voyage. Les policiers soupçonnent désormais certains clans de s’être implantés durablement en France et servir de bases d’accueil pour des équipes qui se déplacent entre l’Irlande et toute l’Europe occidentale.