Exercices de sécurité dans les écoles : "passer par le jeu est une bonne méthode"

Trois exercices de sécurité par an seront réalisés à partir de la rentrée prochaine.
Trois exercices de sécurité par an seront réalisés à partir de la rentrée prochaine. © AFP
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A partir de la rentrée scolaire, les exercices de confinement en cas d'attentat ou d'intrusion seront obligatoires dans tous les établissements, de la maternelle au lycée.

Alors que le gouvernement dévoilé mercredi, à une semaine de la rentrée, un plan de sécurisation des établissements scolaires, la mise en place obligatoire d'exercices de sécurité inquiète certains parents. Interrogé par Europe 1, Stéphane Clerget, pédopsychiatre et auteur de l'ouvrage Le pédopsy de poche, relativise l'impact de ces mesures de sécurité sur les enfants, même les plus jeunes.

Dès la rentrée, des exercices de sécurité seront obligatoires dans toutes les écoles, y compris en classes maternelles. Pour ne pas effrayer les plus petits, l'exercice sera réalisé sous la forme du jeu "Le roi du silence". Est-ce une bonne chose ?

Oui, passer par le jeu est une bonne méthode. Il permet à la fois de prendre du recul par rapport aux éléments de la réalité et de bien intégrer celle-ci. Le jeu offre aussi une maîtrise sur la réalité qui rassure l'enfant : il y a des règles, on décide de son début et de sa fin. D'autre part, on peut mettre ces exercices sur le même plan que les alertes incendies, auxquelles les enfants déjà sont habitués.

Mais le risque n'est-il pas alors que l'enfant ne prenne pas au sérieux l'exercice, qu'il ne comprenne pas pourquoi il fait cela ?

Non, c'est par le jeu que cela fonctionnera pour les plus petits. Si l'on prend la menace trop au sérieux, on ne peut plus l'affronter. Notre capacité d'imagination est ce qui rend la vie possible. Il n'y a qu'à voir la façon dont les enfants vont revivre leur journée en la rejouant le soir avec leurs personnages, en mettant en scène avec leurs jouets, par exemple, une dispute à l'école ou avec les parents. Le jeu est véritablement ce qui leur permet de digérer la réalité, de mieux l'intégrer tout en calmant leur peur.

Certains parents appréhendent ces exercices, craignant qu'ils suscitent stress ou angoisse chez l'enfant… Ont-ils raison de s'inquiéter ?

Il faut les rassurer. Toutes ces mesures visent à se protéger d'un danger éventuel. L'action rassure face à la peur. A partir du moment où l'on va proposer des actions qui aident à se protéger - comme c'est le cas avec ces exercices -, on crée un facteur de réassurance, car on a le sentiment de pouvoir agir contre un danger. Or, ce qui est terrible, c'est de ne pas savoir quoi faire, d'avoir l'impression de ne rien pouvoir faire.

Ces exercices sont un moyen d'éviter un danger, et sont, à ce titre, rassurants. Qui plus est, les enfants en entendent parler – et souvent trop -, alors autant leur donner les moyens de se protéger. Le succès du livre Vivre avec la menace terroriste. Réflexes, gestes et attitudes qui sauvent, qui cartonne en librairie, illustre bien cette démarche.

Cela vaut aussi pour les policiers ou les militaires qui sont postés devant les établissements scolaires : il ne faut pas hésiter à en discuter avec eux, à leur expliquer qu'ils sont là pour protéger tout le monde. Et à l'occasion, leur expliquer ce qu'est un policier, un militaire, quels sont leurs rôles... Tout peut être prétexte à la pédagogie. 

En tant que parent, comment gérer ses angoisses et ne pas la transmettre à son enfant ?

Les angoisses des enfants sont en effet toujours liées à celles des adultes. Si l'enseignant(e) est angoissée à l'idée de l'exercice ou les parents, l'enfant le sera nécessairement. Il faut donc reconnaître cette peur, et la relativiser. Par exemple, en disant que d'autres ne sont pas angoissés, afin que l'enfant puisse s'y identifier. D'ailleurs, très souvent lorsqu'on reconnaît sa peur auprès de l'enfant, celui-ci va vouloir nous rassurer en nous proposant des solutions. Evidemment, même si celles-ci peuvent être un peu loufoques, il faut jouer le jeu !

Enfin, il est important, pour les plus jeunes enfants, de faire attention à ne pas trop leur en parler. Ce n'est pas en parlant d'un danger – surtout de ce type – que l'on va s'en prémunir. Il ne faudrait pas, à terme, que les enfants finissent par supporter et subir au quotidien les angoisses des adultes face au terrorisme.

Ce que contient le plan sécurité au sujet des exercices : 

  • A partir de cette rentrée, il y aura désormais trois exercices de sécurité par an au lieu de deux auparavant. L'un des exercices, baptisé "attentat intrusion", devrait être réalisé par tous les élèves, de la maternelle au lycée, d'ici à l'automne. Il sera annoncé par une sonnerie différente de l'alarme incendie. L'objectif ? Habituer les élèves à un nouveau risque, en évitant la panique.
  • Un guide pratique sera mis à disposition des enseignants et proviseurs pour éviter les traumatismes. Pas question par exemple de mettre en scène des personnages armés.
  • Les exercices seront adaptés aux âges. Pour les plus jeunes, âgés de trois à six ans, ces exercices se rapprocheront d'un jeu, "Le roi du silence". Tous les enfants devront se taire immédiatement. Au collège et au lycée, ils seront plus concrets, avec notamment l’apprentissage des gestes de premier secours.