Dans les Alpes, le réchauffement climatique fragilise les sols 2:45
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Virginie Salmen, édité par Margaux Baralon , modifié à
Lundi a débuté la COP 25 à Madrid, en Espagne, avec encore une fois l'objectif pour les nations de la planète participantes de prendre des mesures écologiques fortes afin de limiter le réchauffement climatique. À cette occasion, Europe 1 vous emmène chaque jour de la semaine sur un continent du monde pour constater les effets du réchauffement. Vendredi, direction les Alpes, où les sols s'affaissent en raison du dégel.
REPORTAGE

Christophe Boloyan connaît les Alpes par cœur. Les roches, les refuges, la neige, et même les stations de ski. Et c'est sur ces dernières, aussi, que ce guide historique de Chamonix a vu les effets du réchauffement climatique. Pas seulement parce que les canons à neige sont de plus en plus sollicités, faute de tombées naturelles. Mais aussi parce qu'il faut de plus en plus souvent intervenir sur les infrastructures. Télésièges, téléskis, télécabines... toutes ces remontés montées sur pylônes sont menacées par la hausse des températures.

"Les pylônes des remontées mécaniques s'affaissent"

"Ce sont les socles des pylônes qui ont tendance à s'affaisser", explique Christophe Boloyan à propos de la télécabine du Bochard, à 2.700 mètres d'altitude, dans le massif des Grands Montets. Avec le réchauffement, les sols ne gèlent plus en permanence. La roche craque, ou bouge, ce qui déstabilise les remontées mécaniques. "L'inclinaison des pylônes et du câble est complètement modifiée. Or, c'est de la mécanique de précision. Les câbles doivent être dans un alignement parfait, on ne peut pas admettre une modification de cette ampleur-là."

L'hiver dernier, la télécabine du Bochard a tellement bougé qu'un million d'euros de travaux ont été engagés pour la consolider et planter des tiges de métal à 12 mètres de profondeur. Résultat : un mois de fermeture imprévue en pleine saison de ski. Et ce n'est pas le seul exemple. Entre 5 et 10% des remontées mécaniques seraient touchées, selon les scientifiques qui surveillent le sous-sol alpin en permanence.

Un refuge entier hélitreuillé

"On a des cas, comme par exemple le télésiège Rosaël à Orelle Val Thorens, où la gare d'arrivée a dû être déplacée et reconstruite 30 mètres en amont du fait de la fonte du permafrost", raconte l'un de ces spécialistes, Pierre-Allain Duvillard. Qui assure néanmoins que cela ne pose aucun risque pour les skieurs. "Les infrastructures sont très suivies et dès lors qu'on a un mouvement de pylône, l'exploitant le voit directement et ferme." Les solutions déployées peuvent être une consolidation, comme au Bochard, ou une construction sur pilotis ou avec des fondations réglables, comme dans les régions où il y a des séismes.

Et les refuges de haute-montagne ne sont pas épargnés. "Un refuge assez emblématique, le bivouac des Périades, filmé dans Premier de cordée, a manqué de s'effondrer cet été", se souvient notre guide, Christophe Boloyan. À 2.600 mètres, "tout le sol s'est affaissé" et "s'est incliné de manière assez impressionnante."

Ce bijou d'architecture montagnarde a été sauvé. Un groupe de guides a mené une expédition pour l'hélitreuiller avec des sangles et l'emporter un peu plus bas le temps que le sol se stabilise. Mais Christophe Boloyan s'inquiète de l'ampleur du réchauffement. "Quand on parle d'éboulement, ce sont des blocs de la taille d'une voiture ou d'un semi-remorque. On peut observer d'une année à l'autre ce qui se passe, mais même d'une journée à l'autre parfois."