Fortnite 2:15
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Marion Dubreuil, Mathilde Durand , modifié à
Pendant le confinement, l'association l'Enfant bleu, qui vient en aide aux enfants maltraités, a créé un personnage éponyme sur le jeux-vidéo en ligne Fortnite. Les jeunes joueurs victimes de violences pouvaient se confier directement dans le jeu, aux écoutants de l'association mobilisés derrière l'avatar.
DÉCRYPTAGE

Les jeux en ligne, un nouveau moyen pour dénoncer les maltraitances ? Pendant le confinement, l'association de protection de l'enfance, l'Enfant bleu a expérimenté une nouvelle interface de signalement pour les mineurs sur le jeu gratuit Fortnite. Un jeu en ligne incontournable qui compte plus de 250 millions de joueurs à travers le monde et qui a un fort succès auprès des plus jeunes. Avec l'agence Havas, l'association a développé un personnage qui permet aux enfants de se confier en toute discrétion à des écoutants de l'Enfant bleu, mobilisés sept jours sur sept.

Un avatar pour se confier en toute discrétion

Avec le confinement, la situation des enfants victimes de violence était encore plus difficile. "Ils étaient coupés de toutes les personnes, que l'on appelle 'adultes protecteurs', les personnes à qui ils pouvaient se confier ou les personnes qui pouvaient repérer le problème pour cet enfant. Il était essentiel de trouver un autre moyen à leur disposition pour qu'ils puissent alerter", rappelle Laura Morin, présidente de l'Enfant bleu, qui estime que l'association a reçu deux à trois fois plus d'appels que d'habitude.

L'avatar est directement intégré dans le jeu-vidéo, avec des caractéristiques propres reconnaissables. "On a fait attention à ce qu'il ait un physique particulier, des accessoires particuliers, parce qu'on ne voulait pas que les enfants puissent se tromper ou que des personnes mal intentionnées puissent créer un personnage ressemblant", explique la présidente. 

Pour faire connaître l'avatar sans attirer l'attention des adultes, l'Enfant bleu s'est appuyé sur l'agence Prism Gang, une agence de joueurs influents auprès des jeunes. "Ce qui était important c'était de faire connaître ce personnage auprès d'un maximum de jeunes, qu'ils comprennent comment l'utiliser s'ils sont victimes de maltraitances", explique le directeur de l'agence, Charles Bruet. "Tout est fait pour que le jeune puisse communiquer directement à l'intérieur du jeu, de façon la plus discrète possible."

1.200 ajouts, 30% de réels échanges

L'expérience a été "très encourageante", selon Laura Morin. En un mois, 1.200 enfants ont ajouté le personnage de l'enfant Bleu en ami et cela a permis 30% d'échanges réels avec des mineurs en difficulté. Les conversations étaient organisées selon des grilles de questions, élaborées par les juristes et les psychologues de l'association l'Enfant bleu. L'objectif : récupérer les informations pour repérer l'enfant, déterminer sa problématique et si besoin pouvoir faire "une information préoccupante", c'est-à-dire signaler le cas de l'enfant aux services aptes à le protéger.  

L'Enfant bleu va animer un groupe de travail à la rentrée avec des policiers, des magistrats mais également le secrétariat d'Etat à la Protection de l'enfance et des éditeurs de jeux-vidéo afin d'améliorer et de généraliser le dispositif. Près de 96% des 10-17 ans jouent au moins une fois par jour à des jeux-vidéo. Ce nouvel espace d'interaction est donc prometteur pour la mise en place de signalement via ces médias. "Au sein de l'association, on réfléchit déjà depuis plusieurs mois à aller au bon endroit, là où sont les enfants", constate Laura Morin. "Ils n'ont pas la même utilisation des médias, de la technologie, il faut s'adapter à eux."