Ingrid, 48 ans, victime d'inceste, raconte ses séquelles et sa reconstruction. 1:30
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Louise Sallé
La Commission inceste, la "Ciivise", publie ce mercredi une synthèse des témoignages recueillis par téléphone ou au cours de réunions publiques depuis plus d'un an. Parmi ces témoignages, celui d'Ingrid, 48 ans. Violée par son père entre ses 10 et 17 ans, elle se confie au micro d'Europe 1 sur sa reconstruction.

La Ciivise publie ce mercredi une synthèse des témoignages recueillis par téléphone, par écrit ou au cours de réunions publiques. Ce bilan porte sur les conséquences de long terme de ces violences : vie professionnelle et affective, santé physique et mentale… Les séquelles sont nombreuses et surtout douloureuses dans le temps, pendant de très longues années. Violée par son père entre ses 10 et 17 ans, Ingrid a accepté de se confier sur sa reconstruction au micro d'Europe 1.

"Un trauma"

Parmi les troubles les plus répandus chez les victimes d'inceste: les addictions. Plus d’un tiers des près de 15.000 victimes interrogées ont ainsi développé des problèmes de toxicomanie. Et cela ne concerne pas que la drogue ou l’alcool… Les conduites addictives peuvent prendre différentes formes. Et Ingrid n'y échappe pas, elle en a même longtemps souffert. "C'est surtout l'envie de mourir, des tentatives de suicide", confie-t-elle. "On peut se retrouver dans des addictions aussi sexuelles". "C'est un trauma. N'importe quelle situation, que la victime va subir un jour dans sa vie, telle qu’une odeur qui va lui rappeler sa souffrance… Va la perturber", reprend-elle. "A ce moment-là, elle va vouloir éteindre cette mémoire, en l’anesthésiant émotionnellement. D'où les drogues, les jeux, le sexe…"

Une vie amoureuse compliquée

Ingrid vit aujourd’hui beaucoup mieux, heureusement, grâce à une longue psychanalyse. Mais ses relations amoureuses ont, elles aussi, pâti des violences subies pendant son enfance. Une autre séquelle. "J'avais des relations avec les hommes qui étaient vraiment bizarres, vraiment particuliers", relate-t-elle. "Comme beaucoup de victimes d’inceste, notre vie amoureuse, je crois que c'est ce qui est le plus catastrophique", conclut Ingrid. "C'est quelque chose qui ne vous quitte pas et c'est comme si on avait une jambe en moins, mais que ça ne se voit pas. C'est un handicap, quelque part, que l'on porte."

Outre la vie affective, le travail est également impacté, pour 40% des personnes interrogées par la Ciivise. Après une année à recueillir des milliers de témoignages à travers la France et à l’approche du projet de loi de finance, la Commission inceste recommande à l’État de financer des soins spécialisés en psycho-trauma pour les victimes d’inceste, tout au long de leur vie.