Affaire Alexandre Benalla : "En 28 ans de police, je n'ai jamais vu ça"

Denis Jacob 1280
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Romain David , modifié à
Pour Denis Jacob, secrétaire général du syndicat de police Alternative CFDT, le conseiller de l'Élysée impliqué dans une affaire de violences contre un manifestant jette l'opprobre sur la réputation des forces de l'ordre.
INTERVIEW

L'Élysée est en plein tourmente. Une enquête préliminaire a été ouverte jeudi matin suite à la diffusion d'une vidéo montrant un collaborateur d'Emmanuel Macron coiffé d'un casque de CRS, et frappant en pleine rue un manifestant à terre, le 1er mai dernier. Ces images ont laissé pantois Denis Jacob, le secrétaire général du syndicat de police Alternative CFDT. "C'est du jamais vu ! En 28 ans de police, je n'ai jamais vu ça de ma carrière. Quelqu'un qui est habillé en policier, qui se comporte comme un policier… je n'ai jamais vu ça", a-t-il réagi jeudi, au micro d'Europe Midi.

Un observateur qui s'invite dans une intervention de police. L'individu en question, Alexandre Benalla, adjoint au chef de cabinet du président de la République, spécialiste des questions de sécurité, avait demandé deux jours plus tôt à sa hiérarchie s'il pouvait assister à une intervention policière, et voir comment se gérait une grande manifestation, rapporte Le Monde. "Il était là en tant qu'observateur. Ça, ça arrive […]. Dans ce cadre-là, il y a des autorisations données par les autorités de la préfecture de police, notamment quand ça se passe sur Paris", explique le syndicaliste. "L'observateur est mis sous la responsabilité d'un commissaire sur le terrain, et doit rester avec ce commissaire. Il n'est pas là pour intervenir", rappelle-t-il.

"Ce qui me surprend, c'est qu'on ne l'a pas équipé d'un matériel de protection civil, et qu'il ait porté un casque de police", relève encore le syndicaliste. "Il a été porteur d'un brassard et même d'une radio d'après les images que l'on peut voir. Moi, ça m'interpelle".

Un laxisme dévastateur pour l'image des forces de l'ordre. Alexandre Benalla a été sanctionné en interne par une mise à pied de 15 jours et "un changement de fonctions immédiat", a indiqué sur France Inter Julien Denormandie, le secrétaire d'État auprès du ministre de la Cohésion des territoires. Une sanction qui est loin de satisfaire Denis Jacob, au regard notamment des polémiques sur les violences policières qui ont éclaté ces dernières années, en marge par exemple de la mobilisation contre la loi El Khomri en 2016, ou encore lors de l'interpellation musclée de Théo à Aulnay-sous-Bois en février 2017. "On est quotidiennement stigmatisés dans les missions de police, en nous taxant de provocateurs et d'auteurs de violences", déplore le syndicaliste. Or, cette affaire "pourrait donner le sentiment que les pratiques, à la marge, de certains policiers pourraient être couvertes, ce qui n'est absolument pas le cas".

"On nous rappelle quotidiennement l'exemplarité, les règles de fonctionnement de la police et le code de déontologie. Quand on nous parle d'exemplarité […] elle doit être à tous les niveaux, y compris au sommet de l'État", s'offusque Denis Jacob, avant de rappeler que "se faire passer pour un policier, c'est un délit". L'enquête ouverte par le parquet de Paris, et confiée à la Brigade de répression de la délinquance contre la personne, vise des faits de violences par personne chargée d'une mission de service public ainsi que d'usurpation de fonctions et de signes réservés à l'autorité publique.