Responsable du cancer d'un salarié

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Europe1.fr (avec Emilie Nora) , modifié à
La justice a condamné une filiale de Vinci pour "faute inexcusable" après la mort d'un salarié.

"Une faute inexcusable de la part d'Eurovia". Le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bourg-en-Bresse, dans l'Ain, a reconnu coupable lundi cette société, filiale du groupe Vinci, dans l’affaire qui l’opposait à la famille d'un ouvrier du bitume, mort en 2008 d'un cancer de la peau.

Le tribunal a considéré que le contact avec le bitume était un facteur à risque : "la conjonction de projections, voire d'inhalations, du bitume avec les UV favorise, soit le risque né des UV, soit le risque né du bitume", indique le tribunal dans ses motivations.

L'affaire avait débuté à la suite du décès, le 3 juillet 2008, à 56 ans, de José-Francisco Serrano Andrade. Cet ouvrier spécialisé dans l'épandage du bitume et du macadam sur les routes et autoroutes avait succombé des suites d'un cancer de la peau qui s'était déclaré sur le visage. Lors de l'audience, le 12 avril dernier, l'avocat de la famille Andrade, Me Jean-Jacques Rinck, avait souligné que l'ouvrier était "mort d'avoir inhalé trop d'émanations de bitume, reconnues comme éminemment cancérigènes".

Que dit la science ?

L'avocat d'Eurovia, Me Franck Dremeaux, avait quant à lui estimé que la maladie de José-Francisco Serrano Andrade avait été "provoquée par une exposition excessive au soleil et non par l'inhalation de produits toxiques". Lundi soir, Eurovia a annoncé son intention de faire appel et s'est à nouveau défendu, arguant que le jugement allait "à l'encontre des études [scientifiques] les plus récentes".

Pour faire le point, l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail a décidé lundi, de lancer une évaluation sur les risques pour la santé des travailleurs liés à l'usage des bitumes. Il s'agit de "réaliser un recensement complet des données scientifiques existantes" et d'étudier les risques dans le cadre d'une expertise transdisciplinaire "transparente et indépendante".

Un scandale comparable à l'amiante ?

Reste que la décision du tribunal des affaires de sécurité sociale de Bourg-en-Bresse pourrait faire jurisprudence. Près de 80.000 ouvriers seraient en contact de façon plus ou moins prolongé avec le bitume, estime la Fédération nationale de la construction, bois et ameublement, qui souligne que les ouvriers du BTP détiennent avec 155 décès en 2008, le triste record des accidents mortels.

Le bitume, substance composée d'un mélange d'hydrocarbures, provient presque exclusivement de la distillation des pétroles bruts. Plusieurs pays européens reconnaissent le cancer de la peau lié à l'utilisation de bitume comme une maladie professionnelle.