Moines de Tibéhirine: l'Algérie freine la venue du juge Trévidic

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Le juge antiterroriste a dû une nouvelle fois renoncer à se rendre sur place pour mener des expertises dans l'enquête sur l'assassinat des moines.

L'Algérie ne semble visiblement pas prête à coopérer avec la France pour fait avancer l'enquête sur les conditions de la mort des moines de Tibéhirine, enlevés et tués en Algérie en 1996. Alors que l'Algérie s'était engagée à l’automne dernier à accueillir les experts et les magistrats pour l'exhumation des crânes, le juge antiterroriste Marc Trévidic a dû, une nouvelle fois, renoncer à se rendre sur place pour mener des expertises. Cette visite était prévue à partir de samedi, mais faute d'invitation officielle d'Alger, les experts et les magistrats ne pourront pas faire le déplacement.

"Pas vraiment une surprise". Un scénario similaire s'était déjà produit en février dernier. A l'époque, l'Algérie avait prétexté que la venue des experts intervenait au moment de l'élection présidentielle. "Une nouvelle fois, c'est une grosse déception pour les familles des moines. Mais, ce n'est pas vraiment une surprise, cela fait 20 ans que les autorités algériennes ne cessent d'opposer l'opacité et le manque de transparence, avec la justice française", a réagi Me Patrick Baudoin, l'avocat des familles.

Une absence de dépouilles et des questions. Les moines de Tibéhirines ont été enlevés dans la nuit du 26 au 27 mars 1996, dans leur monastère isolé, près de Medea, au sud d'Alger. Les têtes des moines avaient été retrouvées le 30 mai au bord d'une route de montagne. Mais leurs corps ne l'ont jamais été, ce qui a alimenté des rumeurs sur les conditions de leur décès. Alger affirme depuis le début de l'affaire que les sept moines ont été décapités par des islamistes qui les avaient enlevés. Mais après avoir suivi la thèse islamiste, l'enquête judiciaire menée en France s'est réorientée vers une possible bavure de l'armée algérienne.

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Un "feu vert", mais... Mais depuis, l'enquête stagne, notamment en raison du manque de collaboration des autorités algériennes. Les deux magistrats chargés du dossier, Marc Trévidic et Nathalie Poux, avaient adressé une commission rogatoire internationale pour se rendre en Algérie dès fin 2011. Fin 2013, Alger avait finalement donné son feu vert à l'exhumation des têtes, mais pas à l'audition des témoins. Sauf que depuis, les demandes des juges de se rendre en Algérie restent sans réponse.

"L'opération de la dernière chance". Les experts et les magistrats souhaitent exhumer et autopsier les têtes des moines. Ils comptent notamment chercher d'éventuelles traces de balles et constater si les têtes ont été coupées avant ou après le décès des moines. Me Baudoin espère ainsi que la venue de Laurent Fabius en Algérie la semaine prochaine fera avancer le dossier.

Selon le conseil des familles, la venue du ministre des Affaires étrangères est "l'opération de la dernière chance : ou bien les autorités algérienne cessent de nous mener en bateau, ou bien la situation ne se débloque pas et nous en tireront toutes les conséquences. Toutes les conséquences cela veut dire que si on ne permet pas à la justice française de faire toute la lumière, c'est qu'on a quelque chose de grave à cacher. C'est-à-dire une implication des militaires algériens dans l'enlèvement et la séquestration des moines".

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