Maladie professionnelle : Areva condamné

Le géant du nucléaire doit verser 200.000 € à la famille d'une victime décédée d'un cancer du poumon.
Le géant du nucléaire doit verser 200.000 € à la famille d'une victime décédée d'un cancer du poumon. © MAXPPP
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avec AFP , modifié à
Le géant du nucléaire doit verser 200.000 € à la famille d'une victime d'un cancer du poumon.

C'est un jugement qui pourrait faire jurisprudence. Vendredi, le tribunal des affaires de Sécurité sociale de Melun a condamné Areva après  la mort  d'un ex-salarié d'une mine d'uranium du groupe français au Niger, victime d' un cancer du poumon.

"Une faute inexcusable"

Le tribunal a jugé que le géant du nucléaire avait commis "une faute inexcusable", en tant que "co-employeur", et a condamné l'entreprise à verser des dommages et intérêts d'un montant dépassant les 200.000 euros et le doublement de la rente de la veuve de l'ex-salarié, Serge Venel, a précisé l'avocat Jean-Paul Teisonnière.

Serge Venel, mort à l'âge de 59 ans d'un cancer du poumon en juillet 2009, a travaillé de 1978 à 1985 pour une filiale d'Areva, la Cominak, société de droit nigérien qui exploite des mines d'uranium du groupe à Akokan, au nord-ouest du Niger. "Quand mon père a vu le pneumologue en mars 2009, il a tout de suite dit que ce n'était pas la cigarette qui était la cause du cancer mais bel et bien l'inhalation de poussières d'uranium", avait expliqué lors de l'audience Peggy Venel, la fille de la victime.

"Juridiquement, Areva n'était pas l'employeur direct, (...) mais les questions de sécurité et les conditions d'exploitation de la mine sont définies par Areva", a mis en avant l'avocat. "Le tribunal a dépassé l'apparence pour reconnaître la réalité des relations sociales de l'entreprise", a estimé Me Teisonnière. Son client avait un contrat de travail de droit nigérien et ne dépendait pas de la Sécurité sociale française. "Toute la question est la responsabilité de la société mère par rapport à la filiale, et cette question est au coeur de l'actualité avec toutes les délocalisations", a-t-il souligné.

Lors de l'audience, l'avocat d'Areva, Me Philippe Plichon, avait plaidé "l'irrecevablilité" du dossier. "La faute inexcusable s'exerce contre l'employeur, qui est Cominak", avait-il affirmé.

"Une immense joie"

La fille de la victime a fait part de son "immense joie", tout en estimant que "ce n'est pas fini, car Areva va certainement faire appel". Mais "une brèche s'ouvre pour les autres, qui étaient en attente ", a-t-elle souligné, précisant que "beaucoup avaient peur d'attaquer Areva". Peggy Venel a cité "au moins deux" cas qui allaient attaquer.

L'avocat de la famille Venel a déjà mené un long combat aux côtés des victimes de l'amiante. Ces dernières années, les condamnations d'entreprises pour "faute inexcusable" dans des affaires liées à l'amiante se sont d'ailleurs multipliées. Le 3 mai, le TASS de Créteil a par exemple reconnu la "faute inexcusable" commise par Sanofi-Chimie en exposant à l'amiante un ex-salarié de son site de Vitry-sur-Seine, dans le Val-de-Marne.