La "pompe à fric" du cercle Wagram jugée

Le tribunal correctionnel de Paris juge l'ancienne équipe dirigeante du cercle Wagram, un établissement de jeu parisien dont elle aurait détourné plusieurs millions d'euros.
Le tribunal correctionnel de Paris juge l'ancienne équipe dirigeante du cercle Wagram, un établissement de jeu parisien dont elle aurait détourné plusieurs millions d'euros. © MAXPPP
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Frédéric Frangeul avec AFP , modifié à
Les détournements effectués aux tables de jeux ont permis aux milieux corses d’engranger des millions d’euros.

L’INFO. Fausse comptabilité, enveloppes de billets et parrains corses : les ingrédients de ce procès sont dignes d’un polar en noir en blanc. Depuis lundi, le tribunal correctionnel de Paris juge l'ancienne équipe dirigeante du cercle Wagram, un établissement de jeu parisien dont elle aurait détourné plusieurs millions d'euros.

Un premier volet de l'affaire a déjà été jugé à l'automne 2012, devant la même juridiction. Il concernait un "putsch" qui avait permis à un groupe mafieux rival de prendre les commandes du cercle en janvier 2011. Pour ce second, c'est l'équipe "délogée" qui est cette fois jugée.

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Sous la coupe de la "Brise de Mer". Etablissement de jeu de l'avenue de Wagram, dans le XVIIe arrondissement de Paris, principalement dédié au poker, le cercle Wagram a compté, au plus fort de son activité, plus de 21.000 adhérents. L'enquête a permis de déterminer qu'il a été placé durant au moins une dizaine d'années, sous la coupe du gang corse dit de "la Brise de mer", dont le nom provient de l’ancien bar du port de Bastia où ses membres avaient l’habitude de se retrouver. Un autre établissement de jeu parisien, le cercle Eldo, situé lui dans le IIIe arrondissement, subissait les mêmes ponctions sur ses recettes.

Deux des principaux suspects ont été tués. Trois membres du célèbre gang de la "Brise de mer", Richard Casanova, François-Antoine, dit Francis, Guazzelli et son frère Jean-Angelo Guazzelli sont soupçonnés d'avoir placé, à la tête du cercle, des hommes de confiance. De ces trois hommes, seul Jean-Angelo Guazzelli comparaît devant le tribunal correctionnel, les deux autres ayant été tués par balles en Corse, respectivement en 2008 et 2009. Il était le seul des 16 prévenus encore détenu mais a été libéré mi-juillet.

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Une manne pour les bandits corses. Le système mis au point par cette filière corse a fonctionné comme une horloge suisse durant de nombreuses années, facilité par une législation peu contraignante, datant de 1947, et des contacts au sein de la police. Concrètement, des prélèvements étaient effectués directement sur les tables de jeu, échappant à toute comptabilité. S'y ajoutaient les pourboires versés aux employés du cercle, dont une partie était détournée, le reste revenant au personnel dans des enveloppes. Selon les estimations, le produit de l'ensemble de ces détournements aurait rapporté au gang de la Brise de mer entre 90.000 et 350.000 euros par mois. Au total, le ministère public estime qu’une somme de 5 à 10 millions a été détournée depuis les années 2000. Le cercle Wagram a été fermé en 2011, de même que le cercle Eldo.

Jean-Angelo Guazzelli et les principaux prévenus comparaissent pour association de malfaiteurs. S'y ajoutent, pour Jean-Angelo Guazzelli, le chef de recel d'abus de confiance et, pour ses hommes de main supposés, ceux d'abus de confiance et de travail dissimulé. Les chefs de blanchiment et d'extorsion de fonds, initialement retenus lors de l'information judiciaire, ont finalement été écartés. Le procès doit durer trois semaines, jusqu'au 4 octobre. Les auteurs du "putsch" de 2011 seront, eux, rejugés mi-novembre, le parquet ayant fait appel.