L'avocat n'aura pas l'accès complet au dossier du gardé à vue

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avec Alain Acco , modifié à
JUSTICE - Les députés ont toutefois voté lundi en faveur de la création du statut de "suspect libre" qui donnera le droit de recourir à un avocat.

INFO. C'est une réforme réclamée depuis longtemps par les avocats mais autant redoutée par les policiers. L'Assemblée nationale a adopté lundi une directive européenne qui renforce les droits des gardés à vue. La principale évolution de ce texte consiste à offrir le droit à la présence d'un avocat y compris lors des "auditions libres", qui ne durent que 4 heures maximum. Mais l'amendement EELV n'a toutefois pas été adopté par les députés. Cet amendement proposait d'offrir à l'avocat l'accès à l'ensemble de la procédure visant son client, dès le début de cette mesure de privation de liberté. Le gouvernement et les syndicats de policiers s'étaient élevés contre cet amendement. 

Une révolution de la garde à vue… Avec cet accès à toute la procédure, l'avocat aurait pu disposer de tous les éléments de l'enquête : tous les PV, toutes les écoutes, tous les témoignages à charge recueillis par les enquêteurs. Ainsi, l'amendement EELV allait bien au-delà des directives européennes. L'adoption de ce texte aurait provoqué une véritable révolution et un bouleversement total du fonctionnement de la garde à vue. Le fonctionnement restera donc comme il l'est jusqu'à présent. Aujourd'hui, les avocats n'ont accès à rien et découvrent tout pendant l'interrogatoire de leur client. Une situation qui profite aux policiers en leur permettant de bluffer, de prêcher le faux pour savoir le vrai.

…Et "la fin de la police judiciaire" ? Pour Christophe Rouget, porte-parole du SCSI, premier syndicat d'officiers, l'adoption de cet amendement aurait été un coup fatal pour la Police Judiciaire. "Cette loi remet en cause tout le secret de l'enquête. Il y a une mise en danger des personnes entendues car sur les procès-verbaux figurent le nom des plaignants, le nom des victimes, celui des témoins avec leur numéro de téléphone et leur adresse", s'offusquait-il au micro d'Europe 1.

"Comment va être organisée la consultation du dossier ? Dans quels locaux ? Dans quels délais ? Il faut imaginer que quand une garde à vue commence, la procédure judicaire fait des pages et des pages et c'est cela qui va être donné à un avocat. Combien de temps va-t-il mettre pour consulter le dossier et que va faire le policier pendant ce temps ?", s'interrogeait encore le syndicaliste policier en soulignant que 40 % du temps de la garde à vue est déjà consacré à des tâches administratives.

Soutien de Bernard Cazeneuve et du gouvernement.  Les policiers avaient reçu lundi un soutien de taille en la personne de Bernard Cazeneuve. Le ministre de l'Intérieur qui sortait d'une réunion avec Manuel Valls, s'était ainsi déclaré opposé à la réforme. "Je ne suis pas favorable à cet amendement et ce gouvernement n'est pas favorable à cet amendement, et je ferai ce qu'il faut", a-t-il indiqué à quelques heures de l'examen du texte.

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