Fraise, Nutella : tous les prénoms sont-ils permis ?

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MODE D'EMPLOI - Un tribunal vient de refuser à des parents les prénoms Fraise et Nutella pour leurs filles. Alors, jusqu'où il est possible d'aller en France en matière de prénom ?

Fraise et Nutella s'appelleront finalement Fraisine et Ella. Jugés contraires aux intérêts des deux petites filles, les prénoms initialement choisis par leurs parents ont en effet été refusés par la justice. Cette double affaire soulève une question : jusqu'où les parents peuvent-ils pousser l'originalité concernant le prénom de leur enfant ?

Sur le papier, prime à la liberté des parents. Le choix par les parents du ou des prénoms de leur enfant est libre en France. Ainsi, il n'existe pas de listes préétablies de prénoms dans lesquelles les parents seraient tenus de "piocher".

L'alphabet français s'impose aux prénoms étrangers. Si le calendrier est une source d'inspiration pour beaucoup, rien n'empêche les parents de s'inspirer des calendriers étrangers et, plus généralement, de prénoms étrangers connus. Seule contrainte alors : l'alphabet utilisé doit être celui qui sert à l'écriture du français. Les caractères alphabétiques étrangers (comme le "ñ" hispanique, le "ß" allemand ou encore le "í" catalan) ne sont donc pas autorisés.

Noms communs, personnages de fiction : tout est permis. Mais les parents ne sont pas tenus de choisir un prénom dans tel ou tel calendrier. Loin s'en faut : dans un post de blog, Judge Marie, juge des enfants et présidente d’audience correctionnelle, explique ainsi que les parents peuvent opter pour "des noms du vocabulaire (Cristal), d’autres noms propres (Kléber, Vallès...)" mais aussi "attribuer des prénoms créés par la littérature ou le cinéma (Leeloo, Khaleesi, Anakin...)" et même "créer des prénoms totalement inédits". Le magistrat rappelle ainsi que, dans les années 1970, le couturier André Courrèges avait prénommé sa fille Clafoutis. Un clin d'œil à son dessert préféré mal vécu par l'intéressée qui avait finalement opté pour son second prénom, Marie.

La seule limite : l'intérêt de l'enfant. Dans quel cas, alors, un prénom peut-il être refusé ? C'est ce qui arrive lorsque le prénom en question nuit à l'intérêt de l'enfant (lorsque le prénom est jugé ridicule ou qu'il a une connotation négative, par exemple) ou si le prénom méconnaît le droit d'un tiers à voir protéger son nom de famille.

Lorsque l'officier d'état civil est confronté à cette situation au moment de la déclaration de naissance, il avertit le procureur de la République. Le Parquet peut ensuite saisir le juge aux affaires familiales qui peut demander la suppression du prénom sur les registres de l'état civil.

Reste que déterminer qu'un prénom est contraire à l’intérêt de l’enfant peut se révéler assez subjectif. Pour la petite "Fraise", le juge a décidé que ce prénom serait "nécessairement à l'origine de moquerie, notamment l'utilisation de l'expression 'Ramène ta fraise'". L'expression "ramène ta fraise" est pourtant assez désuète. Et, a contrario, aucun parent n'a été empêché d'appeler sa fille Prune à cause de l'expression "pour des prunes".