Des femmes corses interpellent Hollande

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avec AFP
17 ans après le manifeste pour la vie, elles interpellent l'État pour mettre fin à la loi du sang.

Alors qu'un 18e assassinat a ébranlé l'île de Beauté mardi, un collectif de femmes corses crie son ras-le-bol. Dans une lettre ouverte publiée mercredi dans Libération, les signataires, des citoyennes ordinaires rattachées à aucun mouvement politique, exhortent François Hollande à "agir sans attendre" pour enrayer la spirale criminelle qui ensanglante la Corse.

Dénoncer la loi du sang

Ce sont ces mêmes femmes qui s'étaient réunies en janvier 1995 pour rédiger le "Manifeste pour la vie". A l'époque, leur objectif était de dénoncer la loi du sang qui régnait sur l'île de Beauté. Leur texte avait littéralement secoué la Corse, si bien que plusieurs personnalités politiques, comme Jacques Chirac, Alain Juppé ou encore Elisabeth Guigou, les avaient rencontrées. Après l'assassinat du préfet de Corse Claude Erignac, en 1998, les militantes avaient même entraîné dans les rues plus 40.000 personnes.

Déplorant que rien n'ait changé depuis le début de leur combat il y a 17 ans, ces femmes issues de multiples horizons (droite, gauche, nationaliste, antinationaliste) se réunissent une nouvelle fois pour interpeller l'opinion publique sur la situation en Corse. Evoquant la guerre fratricide entre nationalistes en 1995, les femmes dénoncent "la loi des armes", l'"inertie" des élus et des autorités.

Des initiatives restées sans suite

Les femmes corses témoignent ainsi leur désillusion concernant les annonces successives des gouvernements sur le dossier. "La situation a empiré" puisque l'île de Beauté est devenue "la région la plus criminogène d'Europe !", déplorent-elles dans ce texte.

"Durant toutes ces années, présidents et ministres de la République ont eu tous les moyens pour évaluer la gravité de la situation dans l'île, pour en analyser les causes et décider des solutions (notamment la mission parlementaire Henri Cuq en 1996, la commission d'enquête parlementaire Jean Glavany en 1998, les rapports annuels de la justice et ceux de la chambre régionale des comptes)", précise-t-elles.

Pourquoi, questionnent-elles,"les demandes faites sur la protection des témoins et la création d'un statut de repenti sont-elles restées sans suite ?" Les femmes corses évoquent ainsi des paroles en l'air. "Nous avons cru aux promesses du gouvernement Jospin et ont attendu que l'Etat mette en adéquation ses actes avec ses discours. Cette attente est restée sans suite", déplorent-elles.

"Vous ne pouvez plus nous décevoir"

Les militantes demandent aujourd'hui à François Hollande et à son ministre de l'Intérieur de "saisir l'urgence et la gravité de la situation (...) et d'agir sans attendre. Et, reprenant la célèbre anaphore, elles concluent : "vous (...) ne pouvez plus nous décevoir. Nous, Corses, citoyens normaux, attendons de vous, Monsieur le président, des réponses et des actes concrets."

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