Carlos jugé pour terrorisme à Paris

Carlos est jugé pour la première fois pour des faits de terrorisme.
Carlos est jugé pour la première fois pour des faits de terrorisme. © MAXPPP
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avec agences , modifié à
Le Vénézuélien, déjà condamné à perpétuité pour 3 assassinats, sera confronté à un jury spécial.

Il est devenu un mythe du terrorisme des années 1970 et 1980, sans pourtant jamais avoir été jugé, ni condamné, pour cela. Ilich Ramirez Sanchez, plus connu sous le nom de Carlos, comparaît pour la première fois à partir de lundi devant la cour d'assises spéciale de Paris pour quatre attentats. En 1982 et 1983, ils avaient fait 11 morts et près de 200 blessés.

Chantage pour faire libérer sa compagne

Carlos sera jugé, jusqu'au 16 décembre, par une cour spécialisée dans le jugement d'actes terroriste, composée de sept magistrats professionnels. Il doit répondre de complicité dans quatre attentats. Selon l'accusation, les attaques ont été orchestrées par le Vénézuélien pour faire libérer sa compagne de l'époque, Magdalena Kopp, et un autre membre de son organisation, le Suisse Bruno Bréguet. Au début des années 1980, Carlos dirigeait un groupe d'activistes d'extrême gauche qui fut soutenu, armé et hébergé par le bloc communiste d'Europe de l'Est, notamment la RDA, la Hongrie et la Roumanie.

Magdalena Kopp et Bruno Bréguet avaient été arrêtés à Paris en février 1982 en possession d'armes et d'explosifs. Quelques jours plus tard, un courrier au ministre de l’Intérieur de l'époque, Gaston Deferre, réclamait leur libération "dans un délai de trente jours", ultimatum assorti de "menaces de guerre" contre la France. Les empreintes digitales des deux pouces de Carlos avaient été identifiées sur le document.

Quatre attentats meurtriers

Un mois plus tard, le 29 mars 1982, une bombe explosait dans un train Paris-Toulouse faisant 5 morts. Le jour où débute le procès de Magdalena Kopp et Bruno Bréguet, le 22 avril, l'explosion d'une voiture piégée devant le siège du magazine Al Watan Al Arabi, rue Marbeuf à Paris, tuait une personne.

Les deux autres attentats commis le 31 décembre 1983 à la gare Saint-Charles de Marseille, qui a fait 2 morts, et contre un TGV Marseille-Paris à Tain-L'Hermitage, faisant 3 morts, sont intervenus alors que les deux "camarades" purgeaient leur condamnation à quatre et cinq ans de prison. Ils faisaient aussi suite à un raid de l'aviation française au Liban contre une base du Hezbollah pro-iranien. L'accusation s'appuie pour ces deux dernières actions sur les revendications du crime par une "Organisation de lutte armée arabe", où des experts disent avoir identifié l'écriture de Carlos.

"Une construction du juge Bruguière"

Carlos pourtant ne reconnaît aucun des faits qui lui sont reprochés. Selon son avocat, Me Francis Vuillemin, "ce dossier est une construction du juge Jean-Louis Bruguière, des tonnes de papier qui sont du vent". La défense peaufine encore sa réplique : original de la lettre de revendication introuvable, nombreuses pistes négligées et absence de crédibilité des archives des services de renseignement des Etats du Pacte de Varsovie dont l'ouverture, après 1989, a permis de relancer une instruction en bout de course.

Carlos lui-même demande à voir les preuves contre lui. "Quand on accuse quelqu'un, il faut avoir des éléments. Il n'y a pas d'éléments de preuve encore contre moi", assure-t-il sur Europe 1. "On veut me tuer, c'est tout. Les Américains ne veulent me laisser aller nulle part. On m'a amené ici pour que je crève ici", dénonce-t-il depuis sa prison.

"Ne me parlez pas d'innocence, je vous en prie" :

"Il est affaibli"

Les avocats de Carlos ont depuis peu un grief supplémentaire : l'atteinte "inacceptable" aux droits de la défense constituée par le placement à l'isolement de leur client durant dix jours avant son procès, pour avoir accordé une interview. Pour protester, le détenu a observé une grève de la faim. "Il est affaibli, on l'a déstabilisé et détourné de la préparation de son dossier", dénonce Me Vuillemin.

La cour sera à même de le vérifier lorsque Carlos entrera dans le box où il comparaîtra seul, alors que trois membres de son organisation seront jugés en leur absence pour tout ou partie des faits. Deux d'entre eux, les Allemands Johannes Weinrich et Christa Frohlich ne seront sûrement pas remis par leur pays à la justice française. Weinrich, ancien bras droit de Carlos, purge outre-Rhin une peine de réclusion à perpétuité. Frohlich, libérée de détention provisoire en 2000, a regagné l'Allemagne. Le troisième, le Palestinien Ali Kamal Al Issawi, est en fuite.

Encore un procès possible

Après ce procès, Carlos pourrait encore faire face aux juges dans une dernière affaire où il est mis en examen, un attentat à la grenade qui avait fait deux morts et 34 blessés en 1974 au drugstore Saint-Germain à Paris.