Carlos devant la justice, sans avocats

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Frédéric Frangeul avec AFP , modifié à
RECIT - Après 20 ans de prison, le procès en appel du terroriste s'est ouvert lundi à Paris. 

L’INFO.  Ilich Ramirez Sanchez, alias Carlos, est de retour depuis lundi devant la justice française. Mais sans avocats cette fois : l'accusé leur a demandé de ne pas se présenter à l'audience. Motif ? Devant le refus du Vénézuela, son pays natal, de prendre en charge ses frais de défense, Carlos demande à être représenté par des avocats commis d'office. Une requête pouvant entraîner un renvoi du procès. Condamné deux fois à la réclusion à perpétuité, le symbole du terrorisme des années 70 et 80 doit contester en appel la sentence de son dernier procès pour quatre attentats commis il y a trente ans. Ces attentats avaient causé la mort au total de 11 personnes et faits des dizaines de blessés. A 63 ans, le Vénézuélien vient de passer vingt années dans les prisons françaises. Si sa relation avec l’administration pénitentiaire française n’a pas toujours été au beau fixe, Carlos mène désormais une vie sociale intense derrière les barreaux.

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Une intense vie sociale.  Carlos est incarcéré depuis plusieurs années à la Centrale de Poissy, dans les Yvelines, et s'y est construit un quotidien où ne manquent ni le service à café ni une vie sociale intense, selon des témoins.  De cette prison parmi les plus sécurisées de France, Ilich Ramirez Sanchez a fait un "lieu de vie", selon les mots d'un de ses avocats jusqu'à aujourdhui, Me Francis Vuillemin.  Lectures, écriture, conversations, cours de philosophie et de littérature, l'avocat compare le quotidien du sexagénaire, dont il souligne la "force mentale", à celui des "moines dans une abbaye".

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Il déjeune sur une nappe brodée. Le "moine" Carlos fume le cigare, porte veston et chaussures de cuir, déguste son café vénézuélien dans un vrai service à café après un déjeuner en cellule sur une nappe brodée, comme le raconte dans un livre Aude Siméon, enseignante de lettres à la prison de Poissy où elle a eu Carlos comme élève. "Carlos aime la discussion, il en fait souvent un jeu" avec ses codétenus, les surveillants, intervenants extérieurs, témoigne-t-elle dans "Prof chez les taulards". "Il a besoin de liens sociaux, il les recherche", abonde Me Vuillemin.

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Il accepte les règles de la prison. Les magistrats qui l'ont jugé en 2011 savent quelque chose de ses penchants rhétoriques qui peuvent tourner en long monologue ou être agrémentés de brusques et sonores emportements. "C'est un personnage imprévisible, explosif, on marche toujours sur des œufs, même en le connaissant", reconnaît son avocat. En même temps, "il connaît le système, les limites du système, il joue bien le jeu et accepte les règles de la prison", observe un surveillant de la centrale sous couvert d'anonymat.

Lecture et activités carcérales. Au quotidien, Carlos reçoit beaucoup de visites, un vrai "salon mondain", plaisante Me Vuillemin: de nombreux avocats étrangers et français, dont Me Isabelle Coutant-Peyre, avec laquelle il a noué une union religieuse sans valeur légale. Débordant d'activités carcérales, lecteur jusqu'au cœur de la nuit, selon un surveillant, il "se fiche", selon son avocat, que de jeunes détenus de 25 ans ignorent parfois qui il est, que les médias ne se passionnent plus guère pour son sort:  "son histoire se perpétue à travers la détention et les procès".