L'homme de Denisova vivait sur le plateau tibétain il y a 160.000 ans

© Ian Cartwright / UNIVERSITY OF OXFORD/Max Planck Institute / AFP
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Europe1.fr avec AFP
L'homme de Denisova, groupe frère de l'homme de Néandertal, vivait sur le plateau tibétain à 3.300 m d'altitude il y a au moins 160.000 ans.

C'est une mandibule robuste avec de grandes dents trouvée dans une grotte à 3.300 m d'altitude : elle nous révèle que l'homme de Denisova, groupe frère de l'homme de Néandertal, vivait sur le plateau tibétain il y a 160.000 ans, une "surprise", selon des chercheurs.

Un être déjà adapté aux hautes altitudes

L'étude de ce fossile démontre que l'homme de Denisova, mystérieuse espèce éteinte identifiée en 2010 grâce à l'analyse de l'ADN ancien d'un petit os de doigt trouvé dans la grotte de Denisova, dans l'Altaï en Russie, était présent non seulement en Sibérie du Sud mais aussi en Chine. Et que ce cousin lointain de l'homme était déjà adapté aux hautes altitudes bien avant l'arrivée de l'homme moderne dans cette région, soulignent mercredi ces scientifiques dans la revue Nature.

Une nouvelle technique pour les anthropologues

Cette fois-ci, ce n'est pas l'ADN qui a parlé mais des protéines anciennes qui ont pu être extraites d'une molaire encore présente sur la mâchoire. Une technique nouvelle, développée par l'équipe de Jean-Jacques Hublin à l'Institut Max-Planck d'anthropologie évolutionniste à Leipzig, en Allemagne. Cette découverte est d'importance car jusqu'à présent les paléoanthropologues ne disposaient que de petits fragments d'os trouvés à Denisova, ne permettant pas du tout de savoir à quoi pouvait ressembler cette espèce.

Ce que l'on sait aussi, c'est que l'ADN denisovien a subsisté à l'état de trace dans des populations actuelles d'Asie, notamment au Tibet et dans les régions environnantes. Les populations autochtones d'Australie et de Mélanésie sont celles qui en ont conservé le plus. "Pour que notre ancêtre Homo sapiens, en chemin pour coloniser l'Australie, ait rencontré ces Denisoviens, il a bien fallu qu'il y en ait ailleurs que dans l'Altaï, probablement dans une grande partie de l'Asie continentale", déclare le paléoanthropologue Jean-Jacques Hublin.

Un gène particulier

 

Autre sujet d'enthousiasme : "Avoir des êtres, quand même assez archaïques, qui vivaient sur le plateau tibétain à une telle altitude il y a 160.000 ans, c'est quelque chose que personne n'avait imaginé". Une étude récente parue fin 2018 dans Science avait mis en évidence la présence d'humains à haute altitude sur le plateau tibétain il y a environ 30.000 à 40.000 ans. "Là, c'est quatre fois plus ancien et ce n'est pas un Homo sapiens moderne !", s'exclame-t-il. Cela démontre que les Denisoviens se sont adaptés à un environnement pauvre en oxygène bien avant qu'Homo sapiens n'arrive dans la région. Cela permet de comprendre pourquoi ils avaient un gène particulier pour respirer à haute altitude. Un gène que l'on retrouve d'ailleurs chez les habitants actuels du Tibet et des régions environnantes, qui possèdent un peu d'ADN venant des Denisoviens.