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Cédric Chasseur
En cours d’évaluation, l'application Smokecheck tente de déceler chez les fumeurs les symptômes d'un cancer ou d'une maladie associée à la consommation de tabac. Grâce à treize questions sur la santé de l'utilisateur, elle peut déclencher une alerte afin de l'inciter à consulter son médecin.
INTERVIEW

Fabrice Denis est un récidiviste. Ce cancérologue a créé il y a six ans une application pour détecter les rechutes d'un cancer du poumon, à partir des symptômes de la personne concernée. Validée par des études cliniques, la première application remboursée par la Sécurité Sociale a montré qu'elle pouvait réduire le taux de mortalité de ce cancer de 20% sur un an. Un concept que ce spécialiste a décidé d'adapter à toutes les maladies liées au tabac, avec une application : Smokecheck.

"Si on peut détecter des récidives, on doit pouvoir détecter des maladies", estime Fabrice Denis. Pour ce nouveau projet, il s'est entouré d'un groupe d’universitaire, "de pneumologues, de cancérologues". Leur travail a permis de concevoir treize questions simples sur la santé de l'utilisateur. "Avez-vous une toux persistante depuis plus de trois semaines ? Crachez-vous du sang ?", détaille dans La France bouge, sur Europe 1, le cocréateur de l'application. Grâce aux réponses, il est possible de donner, non pas un diagnostic, "mais une alerte", afin d'inciter le malade potentiel à aller voir son médecin traitant.

"75% de fumeurs montrent un symptôme inquiétant"

L'application Smokecheck, disponible en téléchargement, est en cours d’évaluation. Comme sa grande sœur, elle fait l'objet d'une étude clinique sur 4.000 utilisateurs volontaires. "Après seulement trois mois de déploiement, les premiers résultats commencent déjà à tomber", explique Fabrice Denis. Toutes les données ont été compilées dans un tableau de fréquence des maladies, qui permet une meilleure précision de la lecture des réponses des utilisateurs. "75% de fumeurs montrent un symptôme inquiétant", comme une modification de la voix, la palpation d'une petite masse, des crachats réguliers, ou la présence de sang dans les urines. 18% ont une bronchite chronique, "qui fait le terrain du cancer plusieurs années après". Mais seulement "5% des fumeurs utilisateurs ont probablement un cancer", selon le cancérologue, qui précise que l'application ne leur donne pas de diagnostic, mais simplement une incitation à consulter rapidement un médecin. 

Une application incitative

"Trois fois sur quatre", il y a une alerte, détaille Fabrice Denis, qui reconnaît que son application peut faire peur aux fumeurs. "On s'en sert pour modifier leur comportement", explique-t-il. Au travers de l'application, le cancérologue interroge d'ailleurs les intentions des utilisateurs. "Dans 80% des cas, ils hésitent à arrêter de fumer."

Or, après l'utilisation de l'application, 35% des utilisateurs ont l'intention d’arrêter le tabac, 50% veulent réduire leur consommation de cigarettes. Une mauvaise habitude qui, si elle était éradiquer, permettrait "d’éviter 30% des cancers" selon Fabrice Denis. Selon ce Manceau, c'est "l'équivalent de la ville du Mans qui est rayé de la carte tous les deux ans à cause des effets du tabagisme". La cigarette fait 70.000 morts par an, et dans la plupart des cas, les fumeurs "ne connaissaient pas les symptômes qui devraient les inciter à consulter".