Risque possible de méningiome : de nouveaux médicaments sur la sellette

Deux enquêtes sont chargées de déterminer si l'utilisation de ces deux progestatifs est associée à un sur-risque de développer un méningiome
Deux enquêtes sont chargées de déterminer si l'utilisation de ces deux progestatifs est associée à un sur-risque de développer un méningiome © KENZO TRIBOUILLARD / AFP
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avec AFP
Le Luteran et le Lutényl, ainsi que leurs génériques, utilisés dans la prise en charge de la ménopause, des troubles menstruels et de l'endométriose, pourraient présenter un risque de tumeurs cérébrales.

Des médicaments utilisés dans la prise en charge de la ménopause, des troubles menstruels et de l'endométriose comportent un "nouveau risque possible" de tumeurs cérébrales, dont les femmes doivent être informées, avertit vendredi l'Agence du médicament ANSM.

Le Luteran et le Lutényl concernés. Cette mise en garde intervient plusieurs mois après des mesures d'encadrement drastiques prises pour les mêmes raisons envers un premier médicament, l'Androcur (laboratoire Bayer) et ses génériques (principe actif : acétate de cyprotérone). Les médicaments concernés par cette nouvelle mise en garde sont le Luteran (acétate de chlormadinone) et le Lutényl (acétate de nomégestrol), ainsi que leurs génériques. Des cas de méningiomes ont en effet été associés avec leur usage. Ces médicaments, vendus par neuf laboratoires, sont des dérivés d'une hormone, la progestérone.

Le risque pas encore évalué. Cependant, et contrairement à l'Androcur, ces cas déclarés de tumeurs "ne permettent pas de conclure, à ce stade, que les femmes qui utilisent ces médicaments présentent un risque de méningiome plus élevé que celui observé dans la population générale", ajoute l'ANSM dans un point d'information disponible en ligne. Afin de déterminer si l'utilisation de ces deux progestatifs est associée à un sur-risque de développer un méningiome, une étude épidémiologique sera conduite dans les prochains mois par des experts d'Epi-Phare, une structure d'expertise publique réunissant l'Agence du médicament et l'Assurance maladie. Parallèlement, une enquête de pharmacovigilance est en cours afin de mieux caractériser ce risque, selon l'ANSM.

De "nouvelles recommandations" adressées aux professionnels de santé. Dans l'attente des résultats, l'agence sanitaire a adressé par lettre ses "nouvelles recommandations" aux professionnels de santé (endocrinologues, gynécos, généralistes, pharmaciens, neurologues, neurochirurgiens). L'utilisation de ces molécules - acétate de chlormadinone ou acétate de nomégestrol - "est contre-indiquée en cas d'existence ou d'antécédent de méningiome", souligne-t-elle. En cas de diagnostic de méningiome, le traitement avec ces principes actifs doit être "arrêté immédiatement et définitivement", et la conduite à tenir devra être discutée avec un neurochirurgien.

Les professionnels de santé devront également "informer les patientes de l'existence du risque de méningiome", "(ré)-évaluer la balance bénéfice/risque pour chaque patiente" de ce traitement, en tenant compte de ce risque de tumeurs, en vérifiant auprès des patientes l'absence d'antécédent de méningiome ou de méningiome en évolution connu. Les médecins doivent en outre "prescrire aux doses les plus faibles possibles et sur une durée la plus courte possible" et dans le respect des indications autorisées.

Dans le cas de l'Androcur et de ses génériques, l'ANSM avait souligné que ces médicaments pris à fortes doses pendant plus de six mois, sont à l'origine d'un risque accru bien établi de développer ces tumeurs au cerveau (méningiomes) le plus souvent bénignes.

Un risque "connu depuis plus de dix ans". Pour sa part, la revue médicale indépendante Prescrire indique à l'AFP que "le risque de méningiome lié au traitement hormonal de la ménopause, par oestrogene + progestatif, est connu depuis plus de dix ans". "Le risque est environ deux fois plus grand avec ces traitements", indique Bruno Toussaint, directeur éditorial de la revue. "C'est bien sûr un élément de la balance bénéfice/risques à discuter avec les femmes, et un argument important pour ne pas utiliser longtemps ces traitements", selon lui. Cet ordre de grandeur du risque provient d'une étude américaine sur plus de 355.000 femmes, publiée en 2008, citée dans la revue dans un point sur le sujet "traitement substitutif de la ménopause et méningiomes" paru en février 2010.