Coronavirus : le renforcement du protocole des restaurants est-il une mesure efficace ?

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Jimmy Mohamed , modifié à
Le protocole sanitaire mis en place permet aux restaurants de rester ouverts sous certaines conditions à Paris et dans la petite couronne. Les bars doivent en revanche fermer pour 15 jours. Dans sa chronique santé sur Europe 1, le docteur Jimmy Mohamed juge ces nouvelles mesures inefficaces.

>> Depuis mardi, les bars de Paris et de la petite couronne ont été contraints de fermer leurs portes pour tenter d'endiguer l'épidémie de coronavirus. Les restaurants, eux, peuvent rester ouverts, à conditions de respecter un protocole sanitaire plus strict, avec notamment la tenue d'un cahier de recensement, le port du masque obligatoire entre les plats ou encore la limitation du nombre de couverts. Pour le docteur Jimmy Mohamed, consultant santé à Europe 1, si la première décision est la bonne, la seconde n'est pas forcément adéquate.

"La décision de fermer les bars à Paris était malheureusement logique. Si elle laisse les professionnels dans la tourmente, elle met en lumière le fait qu’il s’agissait de zones extrêmement contagieuses : selon une récente étude, il y a quatre fois plus de risques de contracter le coronavirus dans un bar qu'ailleurs.

En ce qui concerne les restaurants, les choses sont un peu plus compliquées. Le protocole est drastique : port du masque obligatoire sauf au moment de la consommation, gel à table, paiement à table, incitation à la réservation, consommation assise obligatoire, pas plus de six personnes autour d'une même table, un mètre de distance entre chaque chaise et puis un cahier de rappel. A l’heure du numérique, nous sommes obligés d’avoir recours à l’écriture manuscrite alors que l’application StopCovid a la même finalité. Problème, aucune de ces mesures ne permettra un contrôle de l'épidémie.

Nous trompons-nous de cible ?

Il ne faut pas oublier que c'est surtout la contamination par aérosol qui pose un problème. Les seules mesures efficaces auraient été la fermeture, la restriction du nombre de personnes dans un restaurant, l’augmentation des distances. Surtout, il aurait fallu s'intéresser aux systèmes de ventilation qui, pour l'instant, constituent un énorme angle mort. Le protocole actuel donne l'impression qu'il faut contrôler les restaurants pour contrôler l'épidémie et que toute l'épidémie serait la faute des restaurateurs et des restaurants… Ce qui n’est bien sûr pas le cas. Pour contrôler l'épidémie, il faut contrôler nos comportements et aller au restaurant de façon sécurisée. Nous sommes peut-être en train de nous tromper de cible ou, en tout cas, de délivrer le mauvais message.

Concernant les universités, le problème est le même. Nous avons fixé une jauge dans les zones d’alerte maximale : une limitation de 50% des capacités d’accueil dans les amphithéâtres. Mais cette mesure ne changera strictement rien si les étudiants continuent de se réunir dans des appartements et de faire la fête. Ils continueront de tomber malade. 

Des trous dans la raquette

Il y a la loi et l'esprit de la loi. Depuis le mois de juillet, nous entassons les mesures sanitaires, le protocole est renforcé. Or, il y a des trous dans la raquette et nous n'y arrivons pas. Nous avons désormais l'impression que le virus est une fatalité. 

Pourtant, nos voisins européens font beaucoup mieux. Les Italiens recensent cinq fois moins de contamination que nous, et les Allemands sept fois moins. Il est donc possible d'améliorer les choses en changeant nos comportements sans attendre des mesures de restriction qui finiront malheureusement par être de plus en plus sévères. Nous aboutirons peut-être à une catastrophe économique et sanitaire."