Municipales : La bataille de Paris a déjà commencé

Anne Hidalgo et Emmanuel Macron affichent une belle entente. Mais chacun pense déjà à la bataille de Paris à venir.
Anne Hidalgo et Emmanuel Macron affichent une belle entente. Mais chacun pense déjà à la bataille de Paris à venir. © AFP
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A trois - voire quatre - ans de l’échéance, les appétits s’aiguisent déjà pour la prestigieuse mairie de Paris. Les macronistes y songent, alors qu’Anne Hidalgo est en position délicate. 

"Maire de Paris, c’est le mandat de rêve". Rachida Dati n’est semble-t-il pas la seule à le penser. Dans Le Parisien de vendredi, l’ancienne ministre de la Justice rêve tout haut de l’Hôtel de Ville de la capitale, que lorgnent déjà d’autres personnalités. Les élections municipales n’auront lieu qu’en 2020 - voire en 2021 si l’exécutif décide de les repousser - mais la bataille de Paris a déjà commencé. Chaque camp, celui d’Emmanuel Macron en premier lieu, place déjà ses pions, alors qu’Anne Hidalgo, tenue par une majorité pléthorique, semble déjà en position inconfortable.

Les macronistes s’y préparent

Au premier tour de l’élection présidentielle, Emmanuel Macron a remporté 34,83% des voix, et ça n’a évidemment échappé à personne dans l’entourage du président. Pas plus le fait que désormais, 11 des 18 députés de la capitale sont membres de La République en marche. "C’est pour nous !", lâche même en privé le chef de l’Etat, selon Le Parisien. Pour l’heure pourtant, Emmanuel Macron prend bien soin d’épargner Anne Hidalgo, alliée précieuse dans l’obtention des Jeux olympiques de Paris, et partenaire non moins indispensable en vue de la désignation de la ville hôte de l’Exposition universelle de 2025, pour laquelle Paris est candidate, et dont le nom sera révélé en novembre 2018. Et puis il est un peu tôt. "Macron va faire le boa constrictor. Il va la câliner et se rapprocher d'elle pour faire exploser sa majorité à la mairie et que les communistes la lâchent", se méfie déjà un proche de la maire de Paris.

Reste à trouver le candidat marcheur idéal. Le nom de Benjamin Griveaux circule avec insistance. Fin septembre, l’ambitieux secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Economie et des Finances s’est rendu à Londres pour tenter d’attirer les investisseurs à Paris. Au passage, celui qui avait été élu député de Paris avant d'être nommé au gouvernement s’est affiché au côté du jeune et emblématique maire de Londres Sadiq Kahn. Tout sauf un hasard. Pour autant, il ne veut pas aller trop vite. Il a ainsi mis son veto à la création d’un groupe En Marche : au Conseil de Paris, préférant la mise en place de comités locaux dans toute la capitale, histoire de mailler le territoire.

Cela dit, Benjamin Griveaux n’est pas seul. Et ses ambitions commenceraient à agacer Emmanuel Macron lui-même. "Il trouve qu'il commence à prendre la grosse tête", lâche ainsi un proche dans Le Parisien. Le chef de l’Etat pourrait donc, le temps venu, lui préférer un autre candidat : Hugues Renson, vice-président de l’Assemblée nationale et, ce qui ne gâche rien, ancien conseiller du toujours très populaire Jacques Chirac, premier maire de Paris élu en 1977, en poste jusqu’en 1995. En guise de consolation, Benjamin Griveaux pourrait prendre les rênes de La République en marche, en manque criant d’incarnation.

Hidalgo prise dans l’étau

Quand il s’agit d’évoquer Emmanuel Macron, le virage opéré par Anne Hidalgo est spectaculaire. Pendant longtemps, elle n’avait pas de mots assez durs pour le candidat Macron, lâchant même le 8 mai 2016, entre les deux tours, n’en avoir "rien à battre". C’est peu de dire que la maire de Paris a été prise de court, - comme d’autres - par le phénomène Macron, n’anticipant ni sa victoire à la présidentielle, ni son score à Paris, ni la vague En Marche dans la capitale lors des législatives. Depuis, forcément, elle a dû réviser son jugement - et sa stratégie.

Depuis donc, Anne Hidalgo est transformée. C’est avec une grande prudence qu’elle commente les réformes gouvernementales, telle que la suppression de l’ISF ou les ordonnances sur le code du travail, qui hier l’auraient fait bondir. Surtout, elle a opéré un remaniement tout en finesse suite  au départ de deux de ses adjoints, élus sénateurs le 24 septembre. Tout en donnant plus de place à son aile gauche, elle a maintenu sa confiance à Jean-Louis Missika (urbanisme et Grand Paris) et Mao Peninou (propreté), deux de ses adjoints qui avaient soutenu Emmanuel Macron à la présidentielle. Résultat, désormais, sa majorité va du Front de gauche au MoDem.

Un grand écart habile lui permettant de ne pas insulter l’avenir, mais qui l’empêche désormais de faire des vagues, et pourrait se transformer en piège à l'approche du nouveau scrutin municipal. Surtout qu’Anne Hidalgo ne s’en cache pas : elle veut absolument être en place pour accueillir les JO en 2024. "Ce sont les Parisiens qui le décideront mais ce serait mon plus grand rêve", a-t-elle déclaré le 7 septembre sur BFMTV.

La droite parisienne, toujours la plus bête du monde ?

Et puis à Paris, il y a la droite. Qui a tenu la mairie jusqu’en 2001, mais est en perdition depuis, à part dans quelques arrondissements. Et qui, surtout, est incapable de s’unir, offrant le plus souvent le spectacle de ses inimitiés personnelles. Rachida Dati ne fait guère de mystère de sa volonté d’être candidate en 2020. "Personnellement, je préférerais mille fois cela à un portefeuille de ministre", admet la maire du 7ème arrondissement dans le Parisien.

L’ex-garde des Sceaux profite là de la mise en retrait de sa meilleure ennemie, Nathalie Kosciusko-Morizet, battue aux législatives en juin, et qui a depuis quitté la présidence du groupe Les Républicains au Conseil de Paris. NKM n’a toutefois pas renoncé à ses ambitions, puisqu’elle est reste membre dudit conseil. Et les ambitions de sa rivale pourraient tout à fait la pousser à un retour. Pour les deux femmes, le principal écueil serait de réunir la famille. L’une et l’autre sont tellement clivantes qu’en l’état actuel des choses, cela paraît mission impossible.