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Alexis Delafontaine avec AFP / Crédits photo : XOSE BOUZAS / HANS LUCAS / HANS LUCAS VIA AFP , modifié à
L'opposition à la loi immigration se propage. Ce mercredi, 32 départements de gauche ont annoncé désobéir à la future loi et veulent continuer de verser des allocations aux étrangers, un acte de "résistance" pour certains élus comme Anne Hidalgo. Le gouvernement ne voit pas cette initiative d’un très bon œil.

La fronde contre la loi immigration s'est étendue mercredi aux 32 départements dirigés par la gauche, dont Paris, qui "n'appliqueront pas" le durcissement des conditions de versement aux étrangers de l'allocation personnalisée d'autonomie (APA).

Emboîtant le pas au Lot et à la Seine-Saint-Denis, les départements gérés par des exécutifs de gauche (PS, PRG, EELV et DVG) rejettent la "préférence nationale" prévue, selon eux, par la loi adoptée mardi à l'Assemblée nationale avec les voix du Rassemblement national. "Nous, présidentes et présidents de départements de gauche, refusons l'application du volet concernant l'allocation personnalisée d'autonomie (APA) de cette loi inspirée par l'extrême droite, portée par un exécutif qui prétendait incarner la modération et qui n'est désormais plus que l'illustration de la compromission", selon un communiqué conjoint.

Un délai de cinq ans avant d'être éligible à des prestations sociales

La nouvelle loi instaure dans son article 19 un délai de cinq ans pour les étrangers non-européens en situation régulière qui ne travaillent pas, et de trente mois pour les autres, avant d'être éligibles à des prestations comme les allocations familiales ou l'APA, versée aux personnes âgées de 60 ans ou plus en situation de perte d'autonomie.

Qualifiant le texte d'"atteinte grave aux droits fondamentaux des personnes de nationalité étrangère", les départements disent vouloir "continuer à lutter contre le principe de 'préférence nationale' par la défense d'aides sociales qui sont et doivent demeurer universelles". À la fois ville et département, Paris avait annoncé peu avant son refus de pratiquer "la préférence nationale pour (ses) aînés", par la voix de sa maire Anne Hidalgo (PS).

6,38 milliards d'euros en 2021

Les versements d'APA ont représenté un montant de 6,38 milliards d'euros en 2021, selon les chiffres communiqués à l'AFP par l'association Départements de France. Le président du département de la Gironde Jean-Luc Gleyze (PS), également président du groupe de gauche des départements, a déclaré à l'AFP que "nous touchons du doigt une France qui risque de voir revenir, blanchies, les idées de Vichy".

Mais selon Michel Verpeaux, professeur émérite de droit public à l'université Panthéon-Sorbonne, les départements qui contourneraient la loi "s'exposent à des annulations des tribunaux administratifs que pourront saisir les préfets s'ils ne respectent pas la loi".

"Ils pleurent avant d'avoir mal"

"Ils pleurent avant d'avoir mal", assène un conseiller de l'exécutif. Le gouvernement rappelle que le projet de loi immigration doit encore être validé par le Conseil constitutionnel, qui pourrait retoquer cette restriction des allocations. Emmanuel Macron affirme vouloir retravailler ce texte avec sa Première ministre, Élisabeth Borne, pour retirer certaines mesures dérangeantes. "Les allocations pourraient en faire partie", souffle un cadre de la majorité.

Dans le cas contraire, les départements auront l'obligation de respecter la loi. "Mais pour contourner cette mesure, il existe des alternatives", explique Stéphane Troussel, le président socialiste de la Seine-Saint-Denis. Cela pourrait se traduire par la création d'une nouvelle allocation entièrement financée par le département avec leur propre budget, car l'État ne prendra pas en charge ces dépenses supplémentaires.