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Emmanuel Macron a lancé jeudi la consultation sur la réforme des retraites en tentant de persuader plus de 500 personnes. Notre éditorialiste Nicolas Beytout décrypte les enjeux de cette rencontre.

"Je voudrais qu'on se lève tous pour une minute de silence pour ceux qui sont tombés" : c'est par cet hommage aux victimes de l'agression meurtrière à la préfecture de police de Paris qu'Emmanuel Macron a entamé jeudi soir à Rodez un "grand débat" pour expliquer sa réforme des retraites. Puis il a plongé au coeur du débat, comme l’explique notre éditorialiste Nicolas Beytout, vendredi matin au micro de Matthieu Belliard

Emmanuel Macron s’est lancé...

Oui, en espérant que ce qui lui avait bien réussi pour apaiser la crise des "gilets jaunes" lui permettra cette fois, non pas de sortir d’une crise mais de ne pas y entrer.  Et on a retrouvé le chef de l’Etat comme on l’avait laissé, à l’issue de son marathon d’il y a 6 mois : à l’aise, d’autant plus à l’aise que le sujet est compliqué.

Et à votre avis, il a convaincu son auditoire ?

J’en doute : la réforme est tellement immense. Au sommet de l’Etat, on parle même de "refondation", en expliquant que la réforme proposée est plus vaste que la somme de toutes les réformes des retraites menées par les différents gouvernements depuis 30 ans. Il y a donc de quoi être perplexe. Et il faudra certainement d’autres débats pour faire le tour de toutes les questions, de toutes les inquiétudes qui montent ici et là. On le voit d’ailleurs au travers des sondages. La proportion des Français hostiles au projet du gouvernement est un peu supérieure à ceux qui la soutiennent, rien d’étonnant à cela. En revanche, ce qui est plus surprenant, c’est que la part des sondés qui sont indécis et ne se prononcent pas augmente. Et c’est le cas d’un Français sur quatre.

C’est donc ceux-là qu’Emmanuel Macron cherche en priorité à convaincre ?

Bien sûr. Mais je pense que ces débats entre le chef de l’Etat et M. et Mme Tout-le-monde, avec les gens, comme on dit, ces débats ont une autre fonction. Chacun se souvient à quel point Emmanuel Macron a appris de ses discussions avec les Français lors du Grand débat. Il le dit lui-même (je devrais dire il l’avoue lui-même) : "D’une certaine manière, les gilets jaunes ont été très bons pour moi". Et il ajoute : "Mon défi est d’écouter les gens bien mieux que je ne l’ai fait au début du quinquennat".

La voilà, l’autre fonction de cette réunion de Rodez. Prendre le pouls des vrais gens sur cette méga-réforme. Non pas seulement essayer de les convaincre, mais se faire une opinion par lui-même, et pas uniquement au filtre de tous ceux qui lui racontent la beauté et l’ambition de la construction imaginée par le Haut-commissaire à la réforme des retraites.

Et ces débats pourraient changer le cours de la réforme ?

Je pense, oui. En tout cas, le tempo adopté par le gouvernement. Il a déjà été ralenti, on parle déjà de l’après-élections municipales. Et on entend désormais au sommet de l’Etat que rien ne presse, et qu’il y a des quantités d’aspects sur lesquels le réglage est possible, sur lesquels des garanties pourront être données à certaines professions. C’est ça qui a commencé à se jouer à Rodez.